lundi 24 mars 2008

Dissonances



Début 2005, Banaz Mahmod met un terme à son mariage arrangé par sa famille kurde originaire d’Irak, arrivée à Londres en 1998, quand elle avait 11 ans, et s’enfuit. Son père lui enjoint de revenir à la maison sinon, précise-t-il sur la cassette audio qu’il lui envoie, il tuera sa mère et ses sœurs avant de mettre un terme à ses propres jours. Elle s’exécute.
Peu après, agressée par son frère, elle est hospitalisée. Le frère a été payé par son père pour l’achever mais n’a pas pu aller au bout de la « mission ». De retour à la maison familiale, son père lui reproche de mettre de la laque et de s’occidentaliser ; il la bat assez régulièrement.
Entre-temps, elle a rencontré Rahmat Suleimani, Kurde iranien, ce qui accru la colère de la famille - Rahmat Suleimani ne vient pas du même village que les Mahmod. L’oncle paternel de Banaz Mahmod, Ari Mahmod, lui dira un jour « Eut-elle été sa fille, elle eut été réduite en cendres, pour avoir couvert de honte sa famille en se compromettant avec un Kurde iranien »…
Dernier trimestre 2005, les 2 frères Mahmod réunissent un conseil de famille et, avec 4 de leurs proches, mâles, décident de mettre un terme au « scandale » ; ils commencent à planifier la mise à mort de la « coupable ».
A la toute fin de l’année 2005, Banaz Mahmod est attirée dans l’appartement de sa grand-mère par son père, qui porte des gants et la force à avaler du cognac. Craignant pour sa vie, elle casse une vitre, s’échappe et se retrouve de nouveau à l’hôpital. Le policier auquel elle fait part de ses suspicions concernant les intentions de son père, les ignore et envisage de la poursuivre pour bris de glace…
Plus tard, elle enverra une lettre à la Police, réitérant ses craintes vis-à-vis de son père et de son oncle, lettre dont la Police ne tiendra aucun compte.
A sa sortie de l’hôpital, elle retourne à la maison familiale et convainc sa famille qu’elle a rompu ses relations avec Rahmat Suleimani. Mais un ami de la famille Mahmod aperçoit le couple dans la rue, le 22 janvier 2006…
Quelques jours après, plusieurs individus essaient de faire monter de force Rahmat Suleimani dans une voiture, ce qu’il refuse. L’incident détermine Banaz Mahmod à se rendre, de nouveau, dans un commissariat. Cette fois, les policiers tentent de la persuader de chercher refuge dans un foyer, mais elle refuse, convaincue que sa mère la protègera.
Le lendemain, le père et la mère laissent leur fille seule à la maison. Le temps passe, Banaz Mahmod ne donne pas signe de vie. Rahmat Suleimani s’en inquiète et alerte la Police.
Début mai 2006, sur la foi d’indices recueillis lors d’écoutes téléphoniques, la Police retrouve le corps de Banaz Mahmod dans une valise, enterrée dans un jardin. Elle a été étranglée avec un lacet.
11 juin 2007. Après un procès de 3 mois, le père de Banaz Mahmod est reconnu coupable du meurtre de sa fille par un tribunal londonien. Le policier « sceptique » fait l’objet de poursuites.

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En juin 2007, la Police londonienne arrête le père, le frère et le cousin de Samaira Nazir, 25 ans, retrouvée morte, étranglée et poignardée. Le motif ? Après avoir refusé un mariage arrangé par sa famille avec un homme originaire de son Pakistan natal, Samaira Nazir est tombée amoureuse d’un réfugié afghan. Longtemps, elle a réussi à garder sa liaison secrète mais sa famille a fini par en avoir vent. Fort irritée, elle a exigé que Samaira Nazir mette un terme à cette relation. Son refus va signer son arrêt de mort.
Elle est attirée dans la maison de famille où son père, son frère et son cousin se jettent sur elle. Alertés par ses cris, des voisins viennent frapper à la porte et s’entendent dire : « elle a une crise ». Quelques instants après, la jeune femme essaie de fuir. Elle est rattrapée à la porte, ramenée par les cheveux, et se débat désespérément pendant que la porte se referme, selon le témoignage des voisins.
Quand la police arrive, elle trouve son cadavre baignant dans une mare de sang, une écharpe serrée autour du cou marqué de trois entailles profondes, le corps portant 18 blessures infligées par 4 couteaux différents.
L’enquête révèlera que sa propre mère la maintenait pendant que les hommes de la famille s’acharnaient sur elle, et que 2 petites cousines de Samaira Nazir, 2 ans et 4 ans, ont été témoins forcés de toute la scène « pour apprendre ce qui attend une femme qui ne respecte pas les décisions de la famille… »


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Début mars 2008, rapporte Stephen Brown dans Frontpage Magazine, un Allemand d’origine turque, Deniz Eroglu, 20 ans, comparaît devant un tribunal allemand. Les charges ? Avoir, aidé par un complice en fuite, agressé Yvan Schneider, 19 ans, avec une batte de base-ball ; l’avoir achevé à coups de pied ; avoir transporté le cadavre dans son appartement ; l’avoir démembré, avec l’aide de son propre père, poursuivi pour complicité ; avoir jeté dans une rivière les membres du cadavre, enfouis dans des pots de fleurs emplis de ciment ; s’être débarrassé du torse dans une forêt.
Le « crime » d’Yvan Schneider ? Avoir défloré Sessen X, jeune musulmane originaire d’Erythrée avec qui il aurait été, un temps, lié – bien longtemps avant qu’elle ne rencontre Deniz Eroglu.
Selon certains témoignages entendus au cours du procès, Deniz Eroglu avait exigé que la jeune femme rompe avec toutes ses relations et lui livre, sous la menace, les noms des hommes avec lesquels elle avait, peu ou prou, « sympathisé » avant de le rencontrer – 7 en tout (!) Avec, au sommet de la liste, Yvan Schneider. Après quoi, il l’aurait contrainte à appeler l’étudiant de Rommelshausen, qui ignorait jusqu’à l’existence du nouveau « fiancé » de Sessen X, pour réclamer son aide – un travail de classe à terminer – et lui fixer un rendez-vous – où il l’attendrait, avec son complice.
La défense a plaidé le délire, provoqué par un excès de jalousie.

Dans un article daté du samedi 8 mars 2008, signé Stéphane et intitulé « Les auteurs de l’assassinat sauvage d’un jeune Français condamnés », Nouvelles d’Arménie magazine apporte les corrections et précisions suivantes :
« La justice allemande a condamné mercredi [5 mars] 3 jeunes gens à de lourdes peines, entre 9 et 10 ans de prison, pour l'assassinat sauvage en août d'un jeune français, Yvan Schneider [originaire d'Alsace], exécuté sur la seule foi d'un mensonge qui lui attribuait une liaison...
Avec deux condamnations à 10 ans de prison, le tribunal de Stuttgart a prononcé les peines maximales qui étaient possibles. Elles visent l’accusé principal, Deniz Eroglu, perturbé psychiquement, âgé de 18 ans au moment du crime et dont le tribunal a ordonné l’incarcération dans une institution psychiatrique, et son complice Roman Kuprev, jeune Allemand d’origine russe, 18 ans lui aussi au moment des faits.
A 16 ans, l’amie de Deniz, Sessen Kuflom, une écolière d’origine érythréenne, a été condamnée à 9 ans de prison pour avoir servi d’appât et avoir assisté à la mise à mort.
Enfin, une peine de 3 ans et trois mois de prison a été infligée à Kajetan Borys Marx, un Polono-Allemand de 23 ans qui a aidé à dépecer le corps.
Deniz a agi par jalousie : il a cru le mensonge de son amie Sessen, qui prétendait avoir une relation intime avec Yvan Schneider. Il projetait de tuer non seulement le jeune Français, mais aussi tous les anciens petits amis de la jeune fille…
Le mystère demeure quant aux motivations de Sessen : pourquoi l’a-t-elle attiré dans un tel guet-apens ?
La jeune fille était sous la coupe de Deniz, qui lui interdisait tout contact avec des garçons. Elle était impressionnée par Deniz, jeune chômeur paradant avec des habits neufs et une Mercedes offerte par son père. Alors qu’il était en train de tuer Yvan, Deniz aurait couru vers Sessen et lui aurait dit : "Tu peux voir maintenant à quel point je t’aime !"
Les parents de la victime ont jugé que la peine maximale prévue pour des adultes,... la prison à perpétuité, aurait dû être appliquée à Deniz et Roman. Mais, étant donnée l'immaturité des accusés, la Cour n'a pas eu d'"autre choix" que d'user du droit pénal appliqué aux jeunes, a déclaré le président du tribunal, Jürgen Hettlich.
... Le contexte rappelle les crimes d’honneur en pratique en Turquie, a dénoncé sur le site Weltonline la sociologue turque Necla Kelek, en déplorant que le rôle du père de Deniz n’ait pas été suffisamment souligné durant le procès : musulman convaincu, il a aidé son fils à cacher les traces du crime… »


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Sources :

- « Father in 'honor killing' guilty of murder », The Associated Press, 11 juin 2007.
- Vasko Kohlmayer, « The Brutal Face of Islam », FrontPage Magazine, 28 juin 2007.
- Stephen Brown, « ‘Male’ Honor Murders », FrontPage Magazine, 7 mars 2008.
- Nouvelles d'Arménie Magazine, 8 mars 2008,
www.armenews.com/article.php3?id_article=39194

Illustrations :

- Fausse blonde © copyright Alain Rothstein.
- Face © copyright Alain Rothstein.


Dissonances © copyright 2008 Richard Zrehen

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