dimanche 30 mars 2008

Re-Dissonances



Fin octobre 2000, Bob Simon, correspondant de CBS au Moyen-Orient, ouvre l’émission vedette de la chaîne, « 60 minutes » ainsi : « Près de 40 enfants palestiniens ont été tués, dans les dernières semaines, et des centaines d’autres, blessés. Un garçon de 16 ans, qui n’a pas voulu donner son nom – il dit avoir appris son anglais dans le New Jersey –, s’est trouvé en première ligne pendant des semaines : « Je veux seulement dire aux Juifs [ !] que nous n’abandonnerons jamais notre terre », nous a-t-il déclaré.
Et Bob Simon de commenter : « Tout ça s’est déjà produit. En 1987, les jeunes palestiniens sont descendus dans la rue pour manifester contre l’occupation israélienne. Alors, tout comme maintenant, c’étaient des adolescents contre des soldats, des pierres et des lance-pierres contre les gaz lacrymogènes, les balles en caoutchouc et les balles réelles. Alors, tout comme maintenant, les villes étaient devenues des champs de bataille… »
Après quoi, il interroge un officier supérieur de l’Armée israélienne en charge du maintien de l’ordre, le Brigadier-général Benny Gantz, sur l’« Intifada Al-Aqsa » qui vient de débuter. Extraits :
BS – … Par rapport à la révolte de 1987 ?
BG – … C’est bien plus violent, bien plus que ce que j’ai jamais vu.
BS – … Et tous ces enfants palestiniens tués par des soldats israéliens ?
BG – Si les Palestiniens ne veulent pas s’inquiéter pour leurs enfants, alors il leur appartient de faire en sorte que leurs enfants restent là où ils devraient être… Quand ils mettent leurs enfants en avant et qu’ils tirent sur nous, les enfants se retrouvent en zone de combat et, malheureusement, très malheureusement, ces choses-là arrivent.
BS – Vous pensez vraiment que les Palestiniens envoient délibérément leurs enfants en première ligne ?
BG – Oui.
BS – … Pour faire des victimes ?
BG – C’est cela…


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Bob Simon interroge alors Hanan Ashrawi, qui estime que « de tels propos sont le sommet du racisme ».


Hanan Ashrawi, chrétienne, diplômée (PhD) de l’université de Virginie (USA), ancienne doyenne de la Faculté des Arts à l’université de Bir Zeit (près de Ramallah), porte-parole de la Délégation palestinienne négociant, à partir de 1991, ce qui allait donner les « Accords d’Oslo » (1993), fondatrice de la Commission Palestinienne Indépendante pour les Droits des Citoyens, et, un temps, membre du Conseil Législatif Palestinien pour Jérusalem. – Elle a démissionné en 1998 pour protester contre la façon dont Yasser Arafat menait les pourparlers de paix, et a fondé le MIFTAH (Initiative Palestinienne Pour la Promotion du Dialogue Global et la Démocratie), qui entend « mettre un terme à l’occupation israélienne sur une base plutôt humanitaire qu’historique ou idéologique ».
Hanan Ashrawi qui a publié, le 2 juillet 1998, un article dans Al-Hayat Al-Jadeeda, journal de l’Autorité Palestinienne, dans lequel il est question d’« un mythe trompeur que les Juifs ont nommé Holocauste et exploité pour s’attirer la sympathie… »



HA – … Ils nous disent que nous n’avons pas de sentiments envers nos enfants… Que nous ne sommes pas des êtres humains, des parents, des mères et des pères… Quelquefois, je ne veux pas m’abaisser à répondre, à prouver que je suis humaine. Allons ! Même les animaux ont des sentiments envers leurs petits… »


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Le 29 février 2008, Fathi Hammad, de la Police Militaire du Hamas, fait un discours en arabe, retransmis par la chaîne de télévision Al Aqsa –
www.memritv.org/clip/en/1710.htm, avec sous-titres anglais. Extraits :
« [Les ennemis d’Allah] ne savent pas que le peuple palestinien a développé ses méthodes de mort et de poursuite de la mort. Pour le peuple palestinien, la mort est devenue une industrie, dans laquelle les femmes excellent, comme tous ceux qui vivent sur cette terre. Les anciens y excellent aussi, de même que les moujahidins et les enfants. C’est pourquoi ils ont fait des boucliers humains des femmes, des enfants, des anciens et des moujahidins, afin de défier la Machine-Sioniste-à-Lancer-des-Bombes. C’est comme s’ils disaient : “Nous désirons la mort tout comme vous désirez la vie’’ ».



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Sources :

Frimet Roth, « Palestinian Infanticide », FrontPage Mag, 27 mars 2008.
« To Be Continued, Children On The Frontlines in The Middle East », CBS News, 24 octobre 2000.
Worldtrek.org/odissey/mideast/ashrawi/ashrawibio.
Steven Plaut, « Outrage in Colorado », FrontPage Mag, 5 septembre 2002.
Fathi Hammad, « We Used Women and Children as Human Shields », MEMRI (Middle East Media Research Institute), 29 février 2008.


Illustrations : copyright Alain Bellaïche.





lundi 24 mars 2008

Dissonances



Début 2005, Banaz Mahmod met un terme à son mariage arrangé par sa famille kurde originaire d’Irak, arrivée à Londres en 1998, quand elle avait 11 ans, et s’enfuit. Son père lui enjoint de revenir à la maison sinon, précise-t-il sur la cassette audio qu’il lui envoie, il tuera sa mère et ses sœurs avant de mettre un terme à ses propres jours. Elle s’exécute.
Peu après, agressée par son frère, elle est hospitalisée. Le frère a été payé par son père pour l’achever mais n’a pas pu aller au bout de la « mission ». De retour à la maison familiale, son père lui reproche de mettre de la laque et de s’occidentaliser ; il la bat assez régulièrement.
Entre-temps, elle a rencontré Rahmat Suleimani, Kurde iranien, ce qui accru la colère de la famille - Rahmat Suleimani ne vient pas du même village que les Mahmod. L’oncle paternel de Banaz Mahmod, Ari Mahmod, lui dira un jour « Eut-elle été sa fille, elle eut été réduite en cendres, pour avoir couvert de honte sa famille en se compromettant avec un Kurde iranien »…
Dernier trimestre 2005, les 2 frères Mahmod réunissent un conseil de famille et, avec 4 de leurs proches, mâles, décident de mettre un terme au « scandale » ; ils commencent à planifier la mise à mort de la « coupable ».
A la toute fin de l’année 2005, Banaz Mahmod est attirée dans l’appartement de sa grand-mère par son père, qui porte des gants et la force à avaler du cognac. Craignant pour sa vie, elle casse une vitre, s’échappe et se retrouve de nouveau à l’hôpital. Le policier auquel elle fait part de ses suspicions concernant les intentions de son père, les ignore et envisage de la poursuivre pour bris de glace…
Plus tard, elle enverra une lettre à la Police, réitérant ses craintes vis-à-vis de son père et de son oncle, lettre dont la Police ne tiendra aucun compte.
A sa sortie de l’hôpital, elle retourne à la maison familiale et convainc sa famille qu’elle a rompu ses relations avec Rahmat Suleimani. Mais un ami de la famille Mahmod aperçoit le couple dans la rue, le 22 janvier 2006…
Quelques jours après, plusieurs individus essaient de faire monter de force Rahmat Suleimani dans une voiture, ce qu’il refuse. L’incident détermine Banaz Mahmod à se rendre, de nouveau, dans un commissariat. Cette fois, les policiers tentent de la persuader de chercher refuge dans un foyer, mais elle refuse, convaincue que sa mère la protègera.
Le lendemain, le père et la mère laissent leur fille seule à la maison. Le temps passe, Banaz Mahmod ne donne pas signe de vie. Rahmat Suleimani s’en inquiète et alerte la Police.
Début mai 2006, sur la foi d’indices recueillis lors d’écoutes téléphoniques, la Police retrouve le corps de Banaz Mahmod dans une valise, enterrée dans un jardin. Elle a été étranglée avec un lacet.
11 juin 2007. Après un procès de 3 mois, le père de Banaz Mahmod est reconnu coupable du meurtre de sa fille par un tribunal londonien. Le policier « sceptique » fait l’objet de poursuites.

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En juin 2007, la Police londonienne arrête le père, le frère et le cousin de Samaira Nazir, 25 ans, retrouvée morte, étranglée et poignardée. Le motif ? Après avoir refusé un mariage arrangé par sa famille avec un homme originaire de son Pakistan natal, Samaira Nazir est tombée amoureuse d’un réfugié afghan. Longtemps, elle a réussi à garder sa liaison secrète mais sa famille a fini par en avoir vent. Fort irritée, elle a exigé que Samaira Nazir mette un terme à cette relation. Son refus va signer son arrêt de mort.
Elle est attirée dans la maison de famille où son père, son frère et son cousin se jettent sur elle. Alertés par ses cris, des voisins viennent frapper à la porte et s’entendent dire : « elle a une crise ». Quelques instants après, la jeune femme essaie de fuir. Elle est rattrapée à la porte, ramenée par les cheveux, et se débat désespérément pendant que la porte se referme, selon le témoignage des voisins.
Quand la police arrive, elle trouve son cadavre baignant dans une mare de sang, une écharpe serrée autour du cou marqué de trois entailles profondes, le corps portant 18 blessures infligées par 4 couteaux différents.
L’enquête révèlera que sa propre mère la maintenait pendant que les hommes de la famille s’acharnaient sur elle, et que 2 petites cousines de Samaira Nazir, 2 ans et 4 ans, ont été témoins forcés de toute la scène « pour apprendre ce qui attend une femme qui ne respecte pas les décisions de la famille… »


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Début mars 2008, rapporte Stephen Brown dans Frontpage Magazine, un Allemand d’origine turque, Deniz Eroglu, 20 ans, comparaît devant un tribunal allemand. Les charges ? Avoir, aidé par un complice en fuite, agressé Yvan Schneider, 19 ans, avec une batte de base-ball ; l’avoir achevé à coups de pied ; avoir transporté le cadavre dans son appartement ; l’avoir démembré, avec l’aide de son propre père, poursuivi pour complicité ; avoir jeté dans une rivière les membres du cadavre, enfouis dans des pots de fleurs emplis de ciment ; s’être débarrassé du torse dans une forêt.
Le « crime » d’Yvan Schneider ? Avoir défloré Sessen X, jeune musulmane originaire d’Erythrée avec qui il aurait été, un temps, lié – bien longtemps avant qu’elle ne rencontre Deniz Eroglu.
Selon certains témoignages entendus au cours du procès, Deniz Eroglu avait exigé que la jeune femme rompe avec toutes ses relations et lui livre, sous la menace, les noms des hommes avec lesquels elle avait, peu ou prou, « sympathisé » avant de le rencontrer – 7 en tout (!) Avec, au sommet de la liste, Yvan Schneider. Après quoi, il l’aurait contrainte à appeler l’étudiant de Rommelshausen, qui ignorait jusqu’à l’existence du nouveau « fiancé » de Sessen X, pour réclamer son aide – un travail de classe à terminer – et lui fixer un rendez-vous – où il l’attendrait, avec son complice.
La défense a plaidé le délire, provoqué par un excès de jalousie.

Dans un article daté du samedi 8 mars 2008, signé Stéphane et intitulé « Les auteurs de l’assassinat sauvage d’un jeune Français condamnés », Nouvelles d’Arménie magazine apporte les corrections et précisions suivantes :
« La justice allemande a condamné mercredi [5 mars] 3 jeunes gens à de lourdes peines, entre 9 et 10 ans de prison, pour l'assassinat sauvage en août d'un jeune français, Yvan Schneider [originaire d'Alsace], exécuté sur la seule foi d'un mensonge qui lui attribuait une liaison...
Avec deux condamnations à 10 ans de prison, le tribunal de Stuttgart a prononcé les peines maximales qui étaient possibles. Elles visent l’accusé principal, Deniz Eroglu, perturbé psychiquement, âgé de 18 ans au moment du crime et dont le tribunal a ordonné l’incarcération dans une institution psychiatrique, et son complice Roman Kuprev, jeune Allemand d’origine russe, 18 ans lui aussi au moment des faits.
A 16 ans, l’amie de Deniz, Sessen Kuflom, une écolière d’origine érythréenne, a été condamnée à 9 ans de prison pour avoir servi d’appât et avoir assisté à la mise à mort.
Enfin, une peine de 3 ans et trois mois de prison a été infligée à Kajetan Borys Marx, un Polono-Allemand de 23 ans qui a aidé à dépecer le corps.
Deniz a agi par jalousie : il a cru le mensonge de son amie Sessen, qui prétendait avoir une relation intime avec Yvan Schneider. Il projetait de tuer non seulement le jeune Français, mais aussi tous les anciens petits amis de la jeune fille…
Le mystère demeure quant aux motivations de Sessen : pourquoi l’a-t-elle attiré dans un tel guet-apens ?
La jeune fille était sous la coupe de Deniz, qui lui interdisait tout contact avec des garçons. Elle était impressionnée par Deniz, jeune chômeur paradant avec des habits neufs et une Mercedes offerte par son père. Alors qu’il était en train de tuer Yvan, Deniz aurait couru vers Sessen et lui aurait dit : "Tu peux voir maintenant à quel point je t’aime !"
Les parents de la victime ont jugé que la peine maximale prévue pour des adultes,... la prison à perpétuité, aurait dû être appliquée à Deniz et Roman. Mais, étant donnée l'immaturité des accusés, la Cour n'a pas eu d'"autre choix" que d'user du droit pénal appliqué aux jeunes, a déclaré le président du tribunal, Jürgen Hettlich.
... Le contexte rappelle les crimes d’honneur en pratique en Turquie, a dénoncé sur le site Weltonline la sociologue turque Necla Kelek, en déplorant que le rôle du père de Deniz n’ait pas été suffisamment souligné durant le procès : musulman convaincu, il a aidé son fils à cacher les traces du crime… »


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Sources :

- « Father in 'honor killing' guilty of murder », The Associated Press, 11 juin 2007.
- Vasko Kohlmayer, « The Brutal Face of Islam », FrontPage Magazine, 28 juin 2007.
- Stephen Brown, « ‘Male’ Honor Murders », FrontPage Magazine, 7 mars 2008.
- Nouvelles d'Arménie Magazine, 8 mars 2008,
www.armenews.com/article.php3?id_article=39194

Illustrations :

- Fausse blonde © copyright Alain Rothstein.
- Face © copyright Alain Rothstein.


Dissonances © copyright 2008 Richard Zrehen

dimanche 16 mars 2008

Lost in translation


Le 7 mars 2008, au cours de l’émission BBC’s World News, présentée par Jonathan Charles, est diffusé un reportage montrant la démolition et l’incendie de la maison de la famille d’Ala Abu Dheim, abattu par un officier de sécurité israélien après avoir tué 8 étudiants (et blessé 9 autres) d’une Yeshiva à Jérusalem. Sur des images montrant un bulldozer détruisant une maison en flammes, on entend la voix du reporter de la BBC, Nick Miles, dire : « Dans les heures qui ont suivi l’attaque, les bulldozzers israéliens ont détruit la maison de la famille d’Ala Abu Dheim. Plus tard, ceux qui portent son deuil ont déployé des bannières du Hamas et du Djihad islamique à proximité. »
En fait, cette maison est toujours debout le 12 mars, selon CAMERA (Committee for Accuracy in Middle East Reporting in America), et elle abrite, avec une tente de deuil, amis de la famille et visiteurs venus apporter leur soutien.

Retour en arrière.

Le 10 mars, dit CAMERA, le speaker de la Knesset, Dalia Itzik, a présenté un recours devant les autorités judiciaires compétentes, pour que cette maison et cette tente soient détruites.
Le 12 mars, le ministre de la Sécurité intérieure, Avi Dichter… a déclaré au quotidien Yediot Ahronot : « La démolition d’une maison, spécialement à Jérusalem, est soumise à de strictes considérations de Droit… Sans autorisation de la Justice, nous ne pouvons rien faire. »
A ce jour [le 12 mars], précise CAMERA, la police israélienne s’est contentée d’ordonner le décrochage des bannières du Hamas, du Djihad Islamique et du Hezbollah.


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Le 13 mars 2008, « la BBC publie un communiqué dans lequel on peut lire ceci : « Nous voudrions clarifier un point à propos d’un reportage diffusé… vendredi dernier à propos de l’attaque d’un Séminaire juif de Jérusalem par un palestinien armé. BBC World a dit que la maison de l’assaillant palestinien, située à Jérusalem-est, avait été détruite par les Autorités israéliennes. Ce n’était pas le cas, et les images diffusées étaient celles d’une autre démolition. »


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Le 11 mars 2008, dans une dépêche de l’agence Reuters, en provenance de Milan, on peut lire ceci : « Des graffitis pro-palestiniens en arabe, ont été découverts dans la soute d’un avion d’El Al, au cours d’un déchargement de marchandises à l’aéroport de Milan… »
« C’était quelque chose comme ‘Longue vie à la Palestine’ », écrit au marqueur, a déclaré Raffaele Veri, de la police de l’aéroport… »


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Le 11 mars 2008, dans un article du Yediot Ahronot, on peut lire ceci : « En dépit des mesures de sécurité ayant cours sur les avions d’El Al, des vandales non identifiés ont peint des slogans antisémites dans la soute à bagages d’un avion… d’El AL, probablement lors d’une escale à Milan… Les slogans, en arabe, comprenaient « Mort aux Juifs… »


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Le 17 février 2008, Khaled Abu Toameh

écrit dans le Jerusalem Post : « Des hommes armés ont fait sauter la bibliothèque de la bibliothèque de la YMCA (Young Men's Christian Association) à Gaza [le 15 février 2008]… Il n’y a pas eu de blessé… Le secrétaire-général de la YMCA à Gaza, Issa Saba, a déclaré que la totalité des 8000 livres a été détruite… »


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Le 11 mars 2008, Habibou Bangré écrit dans Afrik.com : « Plusieurs pays arabes ont appelé à boycotter le Salon du livre de Paris, que le président israélien [Shimon Peres] doit inaugurer jeudi [13 mars 2008]… le Liban, l’Arabie Saoudite, le Yémen, l’Iran, l’Algérie, le Maroc et la Tunisie. Le Syndicat algérien des éditeurs et le directeur du centre culturel algérien à Paris, Yasmina Khadra, suivront le mot d’ordre de boycott… L’Organisation islamique de l’éducation, des sciences et de la culture… basée à Rabat, à enjoint ses cinquante pays membres de ne pas se rendre en France pour éviter des « effets négatifs » sur les relations « entre la France et les pays musulmans »…
[Le] mouvement est soutenu par l’Union des écrivains palestiniens, l’Association France Palestine solidarité et quelques auteurs israéliens, comme Aaron Shabbtaï [!]… »


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Sources :

Ricki Hollander, Max Myer, « BBC Fabricates Home Demolition Report », CAMERA (Committee For Accuracy in Middle East Reporting in America), 11-12 mars 2008.
« The BBC "clarifies" its false report », Power Line, 14 mars 2008.
Charles Johnson, « REUTERS: 'DEATH TO THE JEWS' IS 'PRO-PALESTINIAN' », littlegreenfootballs.com, 11 mars 2008.
Khaled Abu Toameh, « Gunmen destroy Gaza Strip's YMCA library, kidnap guards », Jerusalem Post, 17 février 2008.
Habibou Bangré, « Salon du livre de Paris : des pays arabes appellent au boycott », Afrik.com, 11 mars 2008.

Illustrations :
Vers le Kotel, copyright Alain Bellaïche.
Tout passe, copyright Patrick Jelin.







dimanche 9 mars 2008

La terre vomira ses habitants…



En 1861, Christoph Hoffmann et Georg-David Hardegg fondent la Société du Temple (Tempelgesellschaft), à Kirschenhardthof dans l’Etat du Württenberg (Allemagne du sud). Les Templiers sont des protestants qui ont rompu avec l’Eglise luthérienne et poussent leurs membres à s’établir en Terre Sainte pour préparer le Royaume de Dieu sur terre, et hâter le retour du Messie… Leur inspiration :« Cherchez premièrement le Royaume et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît » (Matthieu 6, 33) et « ‘Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, et de toute ton âme, et de toute ta pensée’. C'est là le grand et premier commandement. Et le second lui est semblable: ‘Tu aimeras ton prochain comme toi-même’ » (Matthieu 22, 37-39).



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En 1868, Hoffmann et Hardegg achètent un terrain au pied du Mont Carmel, à Haïfa, pour y créer leur première colonie en Palestine. Ils lui donnent un style distinct, en perçant une large rue principale bordée d’arbres et en faisant construire des maisons à l’Allemande. Travailleurs zélés au service du Seigneur, les Templiers vont puissamment contribuer au développement économique de Haïfa, notamment en créant dans son immédiate proximité, une exploitation agricole communautaire – ce qui est une assez bonne définition du kibboutz
En 1869, Hoffmann part pour Jaffa, où il fonde une autre colonie et une nouvelle exploitation agricole communautaire à Sarona, sur la route qui va à Naplouse, dont les oranges seront les premières à être commercialisées hors du pays sous l’appellation « de Jaffa ».
Dans la foulée, les Templiers organisent, entre Haïfa et les autres grandes villes, des liaisons régulières (par diligence) qui vont s’intensifier au début des années 1870, le nombre de pèlerins faisant le voyage Jaffa-Jérusalem augmentant régulièrement.
En 1872, la Société du Temple s’installe au sud-ouest de Jérusalem. Le terrain a été acheté à des Arabes de Beit Safafa par l’un des membres de la Société du Temple, Matthaus Frank, en vertu d’un accord passé en 1869 entre l’Empire Ottoman et la Prusse.



En 1899, le Kaiser Guillaume II visite la Palestine, en compagnie notamment du colonel von Ellrichshausen qui crée, dès son retour à Stuttgart, la Société d’Aide à l’Etablissement de Colonies allemandes en Palestine, offrant des prêts à faible taux d’intérêt pour permettre aux volontaires d’y acquérir des terres. S’ensuit une nouvelle vague d’émigration et la fondation de nouvelles colonies : en 1902, à Lod, en 1903, près de la première colonie de Jaffa, en 1906, à Bethléem.
En 1910, la Colonie allemande de Jérusalem compte près de 400 habitants, dit Dalia Karpel dans Ha’aretz (28 février 2008), « pour la plupart artisans et commerçants, et elle est plutôt prospère : trois auberges, une banque, un moulin et une boulangerie. Un médecin et deux obstétriciens y exercent, une pharmacie s’est ouverte et un peintre connu y réside. Plusieurs de ses architectes, ingénieurs et ouvriers du bâtiment joueront un rôle important dans la construction de Jérusalem-ouest »…



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En 1918, les Britanniques internent les Templiers des colonies du sud du pays dans un camp situé en Egypte. Ils seront, à leur demande, autorisés à revenir après la fin des hostilités, y compris ceux d’entre eux qui avaient été renvoyés en Allemagne. Le gouvernement mandataire britannique leur versera des compensations à hauteur de 50 % du montant estimé de leurs pertes.



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Jusqu’à l’arrivée d’Hitler au pouvoir, les relations entre les Templiers et leurs voisins juifs étaient bonnes. Les Allemands se servaient dans les boutiques juives et consultaient des médecins juifs, les commerçants juifs vendaient des produits allemands et les cinémas programmaient des films allemands. Hommes d’affaires et commerçants des deux communautés étaient souvent associés. »
Mais à partir de 1933, les choses commencent à changer : « en dépit de l’opposition des anciens, rebutés par l’idéologie nazie… ‘foi indo-germanique menant à l’adoration des idoles’… la Société du Temple va se rallier majoritairement au nazisme »…



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Comment un groupe piétiste prenant pour guide le commandement rappelé par Matthieu, « Tu aimeras ton prochain comme toi-même », qu’un Sage du Talmud, Hillel l’ancien (1er siècle), estime être un parfait résumé de tout l’« Ancien Testament », a pu se convaincre que le temps de l’accomplissement de la Promesse était arrivé ? Comment a-t-il pu se convertir aussi rapidement ? Reconnaître l’Elu en la personne assez insignifiante d’un agitateur autrichien ?
L’empire austro-hongrois disparu dans la tourmente, leur Réel douloureusement troué, Les Templiers étaient en manque de figure médiatrice-unificatrice ? Leur service militaire accompli sous l’uniforme allemand, les jeunes membres de la Société du Temple étaient revenus en Palestine en participant pleinement du déni de réalité ? La défaite ne pouvant venir des chefs, elle résultait à l’évidence d’un « coup de poignard dans le dos », et la main coupable était facilement identifiable… Rome et les papistes en retraite, le moment était venu pour une croisade germano-protestante ayant en vue la (re)conquête de la Terre Sainte et des Lieux Saints et, qui sait, la subjugation/élimination du vieux « peuple élu »? La demande d’incarnation est flottante et l’impatience messianique toujours pathologique ?



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S’appuyant sur un chapitre du livre récent de l’architecte David Kroyanker, The German Colony and Emek Refaim Street, Dalia Karpel écrit :
« En 1933, l’architecte Karl Ruff fonde le Parti Nazi de Palestine. Des sections s’ouvrent à Haïfa, Jaffa, Jérusalem, et dans plusieurs autres colonies des Templiers. La section de Jérusalem est la plus importante : elle compte 67 membres en 1934 (celle de Haïfa n’en compte de 48). Ludwig Buchalter, enseignant à l’école des Templiers de la Colonie allemande de Jérusalem, est nommé chef de la section. Il reçoit ses instructions de Berlin et travaille en coordination avec le consulat d’Allemagne.
En avril 1934, Ludwig Buchalter organise une réception... au quartier général du Parti à Jérusalem pour célébrer l’anniversaire d’Hitler… Le 1er mai 1934, le consulat d’Allemagne organise une réception [pour les Templiers nazis], au terme de laquelle ‘‘il est décidé que, désormais, les membres du parti doivent se saluer avec un ‘Heil Hitler’ et le bras tendu, y compris dans la rue, à la condition que ce salut ne soit pas interprété comme une provocation par les passants’’…
En 1934, la branche britannique des Scouts qui fonctionnait au sein de la Colonie allemande, et organisait différentes activités séparément pour les garçons et les filles ( !), devient une section des Jeunesses Nazies.
Dès 1935, les différentes sections du Parti Nazi en Palestine donnent instruction aux Allemands de ne plus employer de Juifs, et leur recommandent de dissoudre toute association commerciale avec un Juif. Le moulin et la boulangerie de la Colonie allemande de Jérusalem étaient dirigés par Matthaus Frank et son fils Edwin, associés à Eliezer Lipman, un Juif de Safed…
Cette association remontait aux années 1910. En 1914, Matthaus Frank avait aidé Eliezer Lipman à obtenir la nationalité autrichienne, lui évitant ainsi d’être incorporé dans l’Armée ottomane. Au début des années 1920, la famille Lipman avait quitté le quartier juif de la vieille ville de Jérusalem et loué la maison d’un Templier dans la Colonie allemande
In 1935, Edwin Frank revient d’Allemagne en compagnie de sa fiancée nazie. Eliezer Lipman est invité au repas de fête et là, on l’informe, poliment, que… l’association doit être dissoute en raison de l’interdiction [faite aux Allemands] de maintenir des liens d’affaire avec les Juifs…
En 1936, les Arabes entament une révolte contre les Britanniques par une grève générale qui durera 6 mois… Certains d’entre eux voient dans les Templiers de possibles alliés dans leur lutte, et espèrent que l’Allemagne Nazie arrachera la Palestine aux Britanniques… Ludwig Buchalter a raconté au journaliste allemand Ralf Balke, dont le livre sur le Parti Nazi en Palestine est paru en 2001, comment il voyageait sans problème dans les zones contrôlées par les Arabes, au volant de sa voiture qui arborait un drapeau nazi. Un jour, il avait oublié d’enlever le drapeau en pénétrant dans une zone contrôlée par les Juifs, et son véhicule avait été mitraillé…
En 1937, le docteur Eberhard Gmelin, directeur de l’hôpital de la Colonie allemande de Jérusalem et membre actif du Parti Nazi, renvoie les médecins juifs travaillant dans l’établissement…
En 1939, selon Ralf Balke, cité par Dalia Karpel, le Parti Nazi de Palestine compte 350 membres, sur un total de 2 100 Templiers. Cette année-là, les Britanniques internent certains des Templiers et en déportent d’autres en Australie pour « intelligence avec l’ennemi ». Quelques uns seront échangés, pendant la guerre, contre des prisonniers juifs de Bergen-Belsen…
En 1947, le restant des Templiers est déporté en Australie par les Britanniques.
En 1948, l’Etat d’Israël est créé, les Templiers ne peuvent plus revenir dans la région. La plupart élisent résidence en Australie, une minorité choisit de s’installer en Allemagne.
En 1949, La Société du Temple reprend, à Stuttgart, la publication de son bulletin de liaison, Die Warte des Tempels (L’Attente du Temple).
En 1950, la Temple Society Australia, dirigée par le Dr Richard Hoffmann, est créée à Melbourne.
En 1970, la Tempelgesellschaft et la Temple Society Australia sont formellement liées sous la direction du Dr Richard Hoffmann.



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Coda. Ludwig Buchalter est mort centenaire en 2006. Selon David Kroyanker : « Il n’a jamais rien regretté, jusqu’au jour de sa mort. Dans le cadre d’un ‘accord de réparation’ signé en 1962, les Templiers ont reçu des compensations de l’Etat d’Israël [les maisons abandonnée par les Templiers ont été réquisitionnées au lendemain de la déclaration d’indépendance pour y loger des immigrants]. Ludwig Buchalter a obtenu 60 000 $ pour sa maison »…



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Sources :
Dalia Karpel, « Swastikas in Jerusalem », Ha’aretz, 28 février 2008.
Alex Carmel, The History of Haifa under Turkish Rule, University of Basel, Basle 2006.
Wikipedia, article « The Temple Society ».

Illustrations :
Adam, copyright Alain Rothstein.
Copyright filination.com/gallery

dimanche 2 mars 2008

Langues O…



Cecily Cardew : … Le temps du masque inconsistant des bonnes manières est passé. Quand je vois une pelle je l’appelle une pelle.
Gwendolen Fairfax. [Sarcastique] Je suis heureuse de pouvoir dire que je n’ai jamais vu de pelle. Il est clair que nous n’évoluons pas dans le même monde.


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Le ministre italien des Affaires étrangères, M. Massimo D'Alema, ancien dirigeant des Jeunesses Communistes, ancien directeur du quotidien communiste l’Unità, ancien président du Conseil, membre du Comité d'orientation scientifique de l'association « A gauche en Europe » fondée par Michel Rocard et Dominique Strauss-Kahn en 2003, a déclaré, dans un entretien publié vendredi 22 février 2008 dans l’hebdomadaire L'espresso, à propos de l’assassinat du chef de l’aile militaire du Hezbollah, Imad Mughniyeh : « D’après ma définition, une bombe dans une voiture au milieu de Damas, c’était de la terreur… ».
De l’assassinat d’agents opérationnels du Hamas à Gaza par Israël, il a dit que c’était une « pratique inacceptable ».
« Les assassinats ciblés n’ont pas amélioré l’image de l’occident, et ils servent d’alibi à la terreur », a-t-il ajouté.

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Le 14 février 2008, Humphrey Hawksley, reporter chevronné de la BBC, spécialiste de l’extrême-orient, évoque à l’antenne Rafik Hariri, le président libanais, et Imad Mughniyeh, le chef de l’aile militaire du Hezbollah, et parle de « deux victimes de guerre, avec des visions différentes, mais tous deux [hommes] considérés comme grands leaders nationaux ».
Don Mell, photographe à Associated Press, témoin de l’enlèvement, en 1988, de son collègue d’AP, Terry Anderson, par les hommes armés d’Imad Mughniyeh, n’a pas apprécié la formule. Et il a écrit une lettre à la BBC.

Extraits :
« Vous référer, dans la même phrase, à Rafik Hariri et à et Imad Mughniyeh, et dire d’eux qu’ils sont de ‘grands leaders nationaux’ passe l’entendement. L’un était un élu, qui a dépensé des millions de sa poche pour reconstruire son pays. L’autre était probablement le deuxième plus fameux terroriste de la planète…
Je ne critique que rarement les reportages des autres parce que j’ai foi en l’échange de points de vue différents, quels qu’en soient les sources, et respecte grandement le Premier Amendement de la constitution de mon pays. Mais aujourd’hui, vous êtes allé trop loin. Vous avez rendu un immense mauvais service à votre Institution et à la Nation. »

La BBC a répondu à cette lettre.

Extrait :
« Que les supporters du Hezbollah considèrent Mughniyeh dans ces termes, c’est indéniable ; nous reconnaissons, toutefois, que la formulation était imprécise. La description d’Imad Mughniyeh aurait due être explicitement attribuée à ceux qui lui manifestent leur soutien. Nous reconnaissons que cette partie du reportage était ouverte à mésinterprétation. Nous présentons nos excuses à quiconque a été offensé par cet item. »
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Selon Ya Libnan, qui cite Alborz, source proche du gouvernement iranien, la veuve d’Imad Mughniyeh, qui est d’origine iranienne, a déclaré (25 février 2008) que « la Syrie était derrière l’assassinat de son mari… Que la Syrie ait refusé que les enquêteurs iraniens fassent leur travail [d’investigation] est preuve de la complicité de Damas dans le meurtre de mon mari », a-t-elle ajouté.
Hypothèse reprise par le quotidien saoudien Okaz, qui estime qu’une lutte oppose, au sein du Hezbollah, les partisans et adversaires (soutenus par les Services de Sécurité syriens) du rapprochement avec l’Iran.

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Sources :
Oscar Wilde, The Importance of Being Earnest.
Meron Benvenisti, « Killing in Damascus was act of 'terror' », Ha’aretz, 22 février 2008.
Calev Ben-David, « Between the Lines: The 'Beeb,' past and present », Jerusalem Post, 21 février 2008.
« Mughniyeh's widow says Syria behind husband's murder », yalibnan.com, 25 février 2008.
Illustration : copyright François Bensimon.