II. – Leamas, Gold, Fiedler
Ostensiblement marqué par son échec, trop âgé pour le « terrain », trop vieux jeu (« du sang, des tripes, le cricket, le certificat d’études et… il parle français ! »[1]), Leamas se retrouve donc, avec un contrat bientôt arrivé à terme et une retraite très maigre, au « Circus »[2], siège des Services de Renseignement britanniques, dans la section « Banque », placard doré pour agents en fin de course.
Sur la scène ainsi ouverte à l’insu de (presque) tous, Leamas va entamer une involution remarquable (« sa volonté semblait s’être soudainement évanouie »[3]), parcourant à bonne allure la sorte de chemin par lequel Granville fait lentement descendre Apollon vers la grenouille[4] :
« Leamas commença à se décomposer [went to seed = à se ramollir].
On considère généralement qu’une décomposition est un processus lent, mais, dans le cas de Leamas, les choses se passèrent autrement. Sous les yeux de ses collègues, il se métamorphosa de personnage honorablement connu en une ruine alcoolique pleine de ressentiment, et cela en l’espace de quelques mois. »[5]
Une fois amorcé, ce devenir mou, cette dé-synthétisation artisanale suit un cours bien soutenu pour une réactivité triste. Leamas, en contact discret avec le seul Control, Smiley étant censé désapprouver le principe de l’opération [6], commence par malmener les règles : il rogne sur les horaires de travail, emprunte de petites sommes qu’il ne rembourse pas, se néglige, se mêle au petit personnel, ne cache plus qu’il boit, exhale sa rancœur à l’égard de son employeur ingrat et ne manque jamais l’occasion de dénigrer les Américains et leurs différents Services de Renseignement. Il fait le vide autour de lui.
Puis le mouvement s’accélère : il disparaît du Service et, sa pension retenue à la source – il aurait tripatouillé les comptes spéciaux dont il avait la charge –, se retrouve au chômage. Une semaine chez un fabricant de colle, une semaine à vendre des encyclopédies, et le voici employé par la très improbable Bibliothèque des Recherches Psychiques de Bayswater, dirigée par une vieille fille acariâtre et un peu mythomane. Là, il fait la connaissance d’une jeune femme :
« – Je m’appelle Liz Gold…
Elle était grande et un peu gauche, avec un buste allongé et de longues jambes. Elle portait des ballerines pour réduire sa taille. Bien proportionnée mais pas franchement belle, un visage aux traits bien dessinés mais un peu lourds. Elle doit avoir dans les vingt-deux vingt trois ans, se dit Leamas, et être juive. »[7]
Cette rencontre va perturber le processus d’involution. Au bout de trois semaines, la jeune femme invite Leamas à dîner et, tout en pressentant qu’il abrite un secret – « elle avait toujours su qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas du tout chez Leamas »[8] –, persiste et renouvelle ses invitations jusqu’au moment où, suffisamment enhardie, elle essaie de le faire parler :
« Et puis un soir, elle lui demanda :
– Alec, en quoi croyez-vous ? Ne riez pas. Dites-moi…
– … Je crois que l’autobus de onze heures va me ramener à Hammersmith[9]. Je ne crois pas que le Père Noël soit le conducteur...
– Mais en quoi est-ce que vous croyez ?… Vous devez bien croire en quelque chose… Dieu, par exemple… Je le sais, Alec ! Vous avez un drôle de regard parfois, comme si vous aviez quelque chose de spécial à faire, comme un prêtre. Ne riez pas, Alec, c’est vrai…
– Désolé, Liz, vous vous trompez…
Elle sentait qu’il allait se mettre en colère mais elle ne pouvait plus se retenir :
– … Il y a un poison qui vous ronge la cervelle, de la haine. Vous êtes un fanatique, Alec, je le sais, mais je ne sais pas de quoi… un fanatique qui ne veut convertir personne, et ça c’est dangereux. Vous avez l’air d’un homme qui aurait… juré de se venger ou quelque chose comme ça.
Quand il se décida à parler, son ton menaçant l’effraya.
– Si j’étais vous, dit-il rudement, je m’occuperais de mes oignons. »[10]
Premier accroc – et de taille – dans la « couverture » si consciencieusement tissée. L’intuition d’une femme désespérément amoureuse a perçu, sous l’indifférence et la désimplication, une urgence : non pas celle d’un prêtre, comme elle le croit, mais celle d’un pécheur en mal de salut. Effacer cette impression va s’avérer impossible :
« Et tout d’un coup, il lui fit un large sourire, un peu canaille. Elle ne l’avait jamais vu sourire ainsi avant, et Liz comprit qu’il lui faisait du charme :
– Et Liz, en quoi est-ce qu’elle croit ?…
– On ne m’a pas aussi facilement… »[11]
Vouloir rattraper une gaffe, chacun en a l’expérience, est toujours aggraver les choses :
« Plus tard dans la soirée, Leamas remit la question sur le tapis en lui demandant si elle était croyante.
– Vous n’avez rien compris… rien du tout. Je ne crois pas en Dieu.
– En quoi, alors ?
– L’Histoire…
– Ah ! non, Liz… pas ça. Vous n’êtes pas une foutue communiste ?
Elle fit un geste affirmatif, rougissant comme une petite fille devant son éclat de rire, furieuse et soulagée de voir qu’il s’en moquait.
Cette nuit, elle l’invita à rester et ils devinrent amants. »[12]
On peut sourire de cette étrange symétrie – à chacun son papa, sa famille et son territoire – et ne pas s’étonner que ces naufragés finissent par aller si bien ensemble : à l’époque de la parution du livre, on a fait grand cas du contraste entre James Bond, le héros de Ian Fleming[13] tel que transfiguré par le cinéma, menant grande vie et couvert de femmes exceptionnellement belles, et les espions gris et besogneux de J. Le Carré ; et on y a vu une preuve d’authenticité. Mais, au-delà du sentiment qu’inspire la conjonction pathétique de ces deux solitudes surdéterminées, on doit se reposer la question de la compatibilité entre mauvaise conscience et performance, de la possible affinité entre Œdipe et les appareils de pouvoir.
Une longue pratique des séries policières formatées pour la télévision nous a tous appris qu’un enquêteur se voit régulièrement retirer une affaire s’il a en elle un intérêt autre que professionnel. Leamas ne peut pas être un bon instrument dans la machination en cours puisqu’il y va pour lui de son salut, comme une femme intéressée à son sort le lui a représenté maladroitement. Il a pourtant été choisi ; plus, il lui a été proposé de jouer cela même qui ne pouvait manquer de l’habiter : le découragement, la perte de propos, la dépression. Au moment où il vient de se disqualifier pour sa mission, il est difficile de penser que les maîtres de la machine n’ont pas considéré cette éventualité comme fort probable, qu’elle ne les a pourtant pas rebutés ; que le ratage, par conséquent, est ce qu’ils recherchent.
Une semaine après ce gros « lapsus », Leamas ne se présente pas à son travail. Au bout de deux jours, n’y tenant plus, Elizabeth Gold se rend à son appartement, se fait ouvrir la porte à coups de marteau par l’épicier du coin et découvre un Leamas grelottant de fièvre dans le froid et l’obscurité – la facture d’électricité n’a pas été payée. Elle va le soigner, le dorloter et faire le ménage pendant six jours.
« Le vendredi soir, le trouvant habillé mais pas rasé, elle se demanda pourquoi... Sans vraie raison, elle se sentit inquiète. De petites choses manquaient dans la pièce… Elle voulut en demander la raison mais n’osa pas. Elle avait apporté des œufs et du jambon et les fit cuire pour leur dîner pendant que Leamas, allongé sur le lit, fumait cigarette sur cigarette. Quand le repas fut prêt, il alla chercher à la cuisine une bouteille de vin rouge…
- Alec… Alec… Qu’est-ce qui passe ? C’est fini ?
Il se leva de table, lui prit les mains et l’embrassa comme il ne l’avait jamais fait et lui parla doucement pendant longtemps…
- Adieu, Liz… Adieu… Ne me suis pas. »[14]
Au lendemain de cette scène si classique et si incongrue, Leamas se rend chez l’épicier, fait quelques emplettes qu’il prétend payer plus tard et, tout en retenant le sac à provisions auquel l’épicier – qui refuse toute idée de crédit – s’accroche, frappe de deux coups fulgurants le commerçant qui s’affale, une pommette fracturée et la mâchoire décrochée.
Trois mois après, Leamas sort de prison – où il ne s’est pas fait d’ami. Dans les deux heures, il est abordé par William Ashe, prétendu journaliste qui l’aurait connu à Berlin, manifeste mauvaise humeur et réticence, finit par se laisser convaincre d’accepter d’abord de l’argent puis de rencontrer Sam Kiever, supposé diriger une agence de presse. Peu après, Kiever propose à Leamas de travailler pour son agence :
« Je m’intéresse à vous. J’ai une proposition à vous faire. Dans le journalisme… En fait, c’est si bien payé qu’un homme ayant votre expérience… de la scène internationale, un homme avec vos antécédents, vous comprenez, capable de fournir des renseignements précis et probants, pourrait très rapidement se libérer de tout souci financier »[15].
Après quelques coquetteries, Leamas accepte de suivre Kiever en Hollande, où l’affaire – renseignements contre paiement – est censée se traiter avec celui que Leamas sait n’être qu’un représentant du « client », chargé du débroussaillage préalable :
« Ashe, Kiever, Peters : il y avait là une progression en qualité, en autorité qui, pour Leamas, reflétait la hiérarchie d’un service de renseignement ; qui devait également refléter une progression idéologique : Ashe, le mercenaire, Kiever le compagnon de route, et enfin Peters, pour qui les fins ne se distinguent pas des moyens. »[16]
Après les simagrées au « Circus », les petits boulots, les amours pathétiques et la prison, loin de l’Angleterre, Leamas se découvre reterritorialisé :
« Leamas se mit à parler de Berlin. Peters l’interrompait rarement, ne posait de question ou ne faisait de commentaire que rarement mais, quand il le faisait, il faisait montre de curiosité et de compétence techniques, ce qui s’accordait parfaitement avec le tempérament de Leamas. Leamas semblait même faire écho au professionnalisme détaché de son interrogateur ; ils avaient cela en commun. »[17]
On peut redire la chose autrement : un entretien en « face à face », un sujet racontant, au cours d’entretiens n’ayant d’autre raison d’être, son histoire mensongère et parcellaire à un destinataire « professionnel » qui n’est pas sans le savoir[18] et qui n’intervient que rarement, un référentiel et un espace supposés communs… Re-voici Œdipe, saisi en flagrant délit de « tranche » – ce retour provisoire (?) en analyse de celui qui est passé du côté de l’« écoute » – et de transfert mais : Leamas ment, par nécessité mais aussi par calcul, Peters ne cherche pas à l’« ouvrir à la vérité de sa parole et à le guérir de surcroît », et c’est Leamas qui doit, en principe, être payé au terme (?) des séances – avant de prendre une retraite définitive. Figure de la perversion.
Impossible pour autant de s’abandonner longtemps aux délices empoisonnées de l’amour de transfert : le réel mis entre parenthèses ne s’en laisse pas facilement compter. Au troisième jour de son séjour en Hollande, Leamas voit arriver Peters – qui ne s’était pas montré pendant trente-six heures :
« – J’ai de mauvaises nouvelles… On vous recherche en Angleterre. J’ai appris ça ce matin. Ils surveillent les ports.
– Pour quel motif ?
– Officiellement, pour ne pas vous être présenté à un commissariat de police dans les délais fixés après votre élargissement.
– Et en fait ?
– Le bruit court que vous auriez porté atteinte à la sécurité de l’Etat…
Leamas semblait figé sur place.
Control était derrière ça. Control avait déclenché la corrida. Il n’y avait pas d’autre explication. Ashe et Kiever avaient pu se faire épingler, avaient même pu parler, il n’en restait pas moins que Control seul était responsable du charivari… Ca ne faisait pas partie de l’accord… »[19].
Leamas commence à comprendre qu’on ne lui a pas dévoilé toutes les dimensions de la machination et qu’il y joue certainement un rôle différent de celui qui lui avait été offert. Il est perplexe, autre façon de dire qu’il est coincé dans un double bind :
« Comment diable était-il censé réagir ? En se défilant, en refusant de suivre Peters, il ruinait l’opération… Mais s’il poursuivait, s’il acceptait de passer à l’Est, d’aller en Pologne, en Tchécoslovaquie ou Dieu sait où, il n’y avait aucune raison pour qu’ils le laissent repartir. Et pourquoi souhaiterait-il, lui, repartir puisqu’il était officiellement recherché à l’Ouest ? »[20]
Prendre l’initiative de mettre un terme à l’opération serait renoncer au fantasme, ce qui ne saurait aller sans douleur. Sans vraiment balancer, et après avoir étrangement exonéré Control d’une grande partie de sa vilenie en s’attribuant une bonne part de la faute[21], Leamas accepte finalement de suivre Peters dans un pays situé au-delà du rideau de fer, parce que l’interrogatoire n’est pas terminé :
« – Où allons-nous ?
– Nous y sommes. République Démocratique Allemande…
– Je croyais que nous allions plus loin à l’Est.
– Ca viendra… Nous nous sommes dit que les Allemands devraient discuter avec vous. Après tout, l’essentiel de votre travail a concerné l’Allemagne…
– Qui verrai-je du côté allemand ?…
– Qui vous attendez-vous à rencontrer ?
– Fiedler, répondit vivement Leamas, chef adjoint de la sécurité. L’homme de Mundt. Chargé des interrogatoires importants. Un vrai salaud…
Fiedler, c’est sur lui qu’il faut miser, avait expliqué Control, pendant qu’ils dînaient avec Guillam... Fiedler est l’acolyte[22] qui, un jour, poignardera le grand prêtre dans le dos. C’est le seul rival de Mundt qui soit à la hauteur et, de plus, il le hait. Fiedler est juif, bien sûr, et Mundt plutôt de l’autre bord. Un mélange détonnant. Notre travail, dit-il en désignant Guillam et lui-même, a consisté à fournir à Fiedler l’arme pour abattre Mundt. Le vôtre, mon cher Leamas, sera de l’encourager à s’en servir. Indirectement, bien sûr, parce que vous ne le rencontrerez pas... »[23]
Incidente
Après Elizabeth Gold, Fiedler [racleur de violon, mauvais musicien[24]] : les « Juifs » de Le Carré semblent bizarrement avoir en commun avec ceux de Daniel Schmid dans L’Ombre des anges (film de 1975, d’après « Les Ordures, la Ville et la mort », pièce de Rainer Werner Fassbinder, avec Ingrid Caven, R. W. Fassbinder et Klaus Löwitsch) ou ceux d’Andzrej Wajda dans La terre de la grande promesse (film de 1975 ayant obtenu le Grand prix du Festival du Film de Moscou cette année-là, d’après un roman de Wladyslaw Reymont (La terre promise, 1899), avec Daniel Olbrychski, Wojciech Pszoniak, Andrzej Seweryn et Anna Nehrebecka), d’être assez près de leur caricature. Mais laquelle ?
Nous sommes en 1963 : Israël n’a pas encore conquis l’ensemble de Jérusalem ni ces territoires au statut juridique assez flou, annexés par l’Egypte et la Jordanie au lendemain de la guerre d’indépendance de 1948, qu’aucune entité ethnico-culturelle n’avait jamais pensé jusque-là à réclamer pour y exprimer son « être » politique ; le général De Gaulle n’a pas encore fulminé contre le « peuple d’élite, sûr de lui-même et dominateur » (conférence de presse du 27 novembre 1967), perdant Raymond Aron en chemin[25], et donné le branle à sa grande « politique arabe » ; Ulrike Meinhof, fille de pasteur et révolutionnaire marxiste, n’a pas encore expliqué en quoi l’intuition anti-capitaliste des nazis à propos des Juifs était juste (« Six millions de Juifs furent tués et jetés au fumier de l'Europe parce qu'ils étaient des Juifs d'argent… (Geldjuden) » Frankfurter Allgemeine Zeitung, 15 décembre 1972)[26] ; l’Assemblée Générale des Nations Unies n’a pas encore adopté sa Résolution 3 379 (10 novembre 1975) stipulant que « le sionisme est une forme de racisme et de discrimination raciale » ; enfin, la Rote Armee Fraktion (aka « la bande Baader-Meinhof ») n’a pas encore séparé les passagers juifs de l’avion d’Air France assurant la liaison Tel-Aviv/Paris, détourné le 27 juin 1976 vers l’Ouganda d’Idi Amin Dada par ses soins (et ceux du F.P.L.P.) et conduit au bout d’une piste à Entebbé, des « autres » passagers.
J. Le Carré est, à cette époque [son évolution ultérieure, telle qu’elle s’exprime dans La petite fille au tambour (1983) et, plus directement, dans « The United States of America has gone mad »[27] n’est pas sans intérêt] un libéral, dans la vieille acception anglo-américaine du terme : décemment de gauche, anti-totalitaire et submergé par l’immensité de la dette « morale » contractée par l’Europe vis-à-vis de « ses » Juifs.
Par conséquent, chez lui pas d’identification esthétique-marxiste du Juif comme substance-âpre-en-souffrance-maladive-de-territoire à la Meinhof-Schmid[28], pas d’identification rustique du Juif comme substance-avide-indifférente-à-la-Terre [comme disait déjà Hegel] à la Reymont-Wajda (l’aristocrate polonais, l’allemand et le Juif libidineux, cosmopolite et âpre au gain, tous trois arrivistes sans retenue, s’unissant pour exploiter l’« homme du peuple », sans parler de la Juive lubrique face à la jeune fille « innocente », victime désignée des prédateurs), bien au contraire, une identification du Juif à la souffrance : les « Juifs » de Le Carré sont des figures positives c’est-à-dire des victimes, enfants des Prophètes, pas de Moïse, n’observant pas la Loi, sa peu spectaculaire et exigeante minutie, mais haïssant l’idée de l’injustice – certitude d’être meurtris ; leur messianisme est à la fois impatient et désenchanté ; ce sont des bolcheviques de cœur[29], des gens de foi, destinalement voués au sacrifice, à la trahison et au malheur, autant dire des figures christiques.
On remarquera, pour clore cette incidente, que la souffrance est supposée être, en soi, rachat, mais que l’on ne peut être racheté de l’âpreté et qu’on ne le peut pas plus de l’avidité – consubstantielles[30]...
Reprenons.
« – Il est bon ?
Peters haussa les épaules : ‘pas mauvais, pour un juif’…
Leamas, entendant du bruit à l’autre bout de la pièce, se retourna et vit Fiedler se tenant dans l’encadrement de la porte. »[31]
L’entrée en jeu de Fiedler, pour son propre compte et non pas pour celui de l’URSS comme cela avait été sous-entendu, moment attendu de la diégèse, marque une deuxième rupture pour Leamas : c’est une scansion. La réaction violemment hostile qu’elle provoque chez lui, au-delà du jeu prescrit par les recommandations qu’il a reçues[32], laisse supposer qu’il a perçu que le travail de vérité, de perlaboration si l’on veut, a déjà commencé. A preuve, la haute teneur de son éclat en agressivité rentrée à l’égard de Control, mais aussi de lui-même, et le registre non indifférent dans lequel s’expose cette agressivité apparemment destinée à Fiedler, le sexuel :
« J’aurais dû m’en douter… deviner que vous n’auriez jamais les tripes pour faire votre sale boulot tout seul… Typique de votre moitié de pays pourri et de votre misérable petit Service : vous allez chercher le gros oncle pour maquereauter à votre place. Vous n’êtes même pas un pays, même pas un gouvernement, vous êtes une dictature de cinquième ordre de politiciens névrosés… Je vous connais, espèce de sadique… Vous étiez au Canada pendant la guerre, n’est-ce pas ? C’est le putain de bon endroit où il fallait être, n’est-ce pas ? Je parie que vous planquiez votre tête de lard dans les jupons de maman chaque fois qu’un avion passait ? Qu’est-ce que vous êtes, maintenant ? Le petit acolyte rampant de Mundt, avec vingt-deux divisions russes montant la garde devant la maison de votre mère… »[33]
Comment Fiedler pourrait-il en entendre quelque chose ?
« – Dites-vous que vous êtes chez le dentiste. Plus vite ce sera fait, plus vite vous pourrez rentrer chez vous.
– Vous savez parfaitement que je ne peux pas rentrer chez moi… »[34]
Aucune surdité, pourtant, ne saurait empêcher le contre-transfert de s’enclencher, parce que Fiedler aussi est là pour ça, et qu’il n’est pas sans le savoir. Le lendemain, par une remarque d’apparence technique, il annonce qu’ils sont tous deux bons pour une vraie « tranche » :
« – Vous nous posez un grave problème…
– Je vous ai dit tout ce que je savais.
– Oh non ! et, souriant : Oh non ! Vous ne nous avez dit que ce que vous étiez conscient de savoir… »[35]
Et de questions en remarques entrecoupées de considérations « philosophiques »[36] sur les croyances et imaginaires respectifs soutenant le projet de l’un et l’autre empire, de suggestions en hypothèses sur ce qu’impliquent les informations lacunaires délivrées par Leamas – selon le scénario tortueux mis au point avec G. Smiley et P. Guillam – sur l’opération « Rolling Stone », opération qui aurait été dirigée par Control en personne et aurait amené plusieurs fois Leamas à verser d’importantes sommes d’argent sur divers comptes tenus par des banques situées au nord de l’Europe, certainement destinées à un agent qui ne pouvait être un allemand de l’est, assurait-il, parce qu’il l’aurait nécessairement su[37], on découvre sans grande surprise, qu’au bout d’une semaine passée à se promener dans les collines le jour, à mal manger, boire et parler devant le feu, Fiedler commence, par-delà l’intérêt « professionnel », à éprouver de la sympathie pour Leamas – « Vous commencez à me plaire »[38] –, à manifester même de la sollicitude :
« – Pourquoi n’avez-vous pas appelé de la maison ?
– Nous devons être prudents… Vous aussi, vous devez être prudent.
– Pourquoi ? Qu’est-ce qui se passe ?
– L’argent que vous avez versé à la banque de Copenhague…
Fiedler ne semblait pas vouloir en dire plus long…
– Quoi qu’il arrive… ne vous inquiétez pas… Tout s’arrangera, vous comprenez… Il faudra être sur vos gardes pendant quelque temps…
– Ne vous faites pas trop de souci pour ma peau, Fiedler… »[39]
On découvre aussi que Fiedler ne veut rien apprendre de Leamas mais obtenir confirmation d’un soupçon qui le ronge depuis longtemps :
« – J’y ai pensé jour et nuit. Depuis que Viereck a été descendu, je cherche la raison. Au début, ça m’a paru fantastique. Je me disais que j’étais jaloux, que le travail me montait à la tête, que je voyais des traîtres derrière tous les arbres. On finit par devenir comme ça dans notre univers. Mais ça me hantait : il fallait que je tire ça au clair. Il s’était déjà passé des choses bizarres. Il avait peur : peur que nous en prenions un qui parlerait trop. »[40]
Et Leamas qui, peu auparavant se félicitait de voir à quel point le plan de Control marchait bien[41], est maintenant envahi par la peur pour les mêmes raisons :
« – Qu’est-ce que vous racontez ? Vous délirez, dit Leamas. Il y avait de l’effroi dans sa voix.
– Tout se tenait, vous comprenez. Mundt était sorti d’Angleterre tellement facilement – vous me l’avez dit vous-même. Et que vous a dit Guillam : qu’ils ne voulaient pas le prendre. Pourquoi ? Je vais vous le dire : c’était leur homme, ils l’avaient retourné. Ils l’avaient pris, c’est évident, et c’était le prix de sa liberté. Ca et tout l’argent qu’ils lui versaient.
– Je vous dis que vous délirez… Si Mundt a jamais l’idée que vous inventez des choses pareilles, il vous tuera…
– C’est là que vous vous trompez. Vous m’avez fourni la raison, vous, Leamas. C’est pourquoi nous avons besoin l’un de l’autre… La banque de Copenhague a répondu à votre lettre… L’argent a été retiré une semaine après votre passage. La date du retrait coïncide avec un voyage de deux jours au Danemark fait par Mundt en février… »[42]
On doit donc en conclure que le plan a bien fonctionné. En traitant le donné, mieux le connu, comme un matériau, en creusant de petits trous une continuité apparemment sans faille, en fournissant obligeamment de quoi les combler, les maîtres manipulateurs anglais auraient réussi à changer le terme de l’enchaînement et produit du faux là où il y avait du vrai grâce à la conjonction de deux figures œdipiennes, proches par leur révérence à l’égard de l’Idéal et leur malaise corrélatif face à l’argent – très « chrétiens pauvres » à la Molière. Ou encore, en incitant Fiedler à se déplacer pour regarder l’ensemble de la scène d’un autre endroit, les maîtres manipulateurs anglais l’auraient amené à découvrir comme appartenant au paysage précédemment masqué les motifs – propres à capter un désir intense et à lui offrir de quoi s’accomplir – dont ils l’auraient peuplé.
Peu de temps après, les deux hommes sont arrêtés sur l’ordre de Mundt.
A suivre…
Notes :
[1] The spy…, p. 19. – Le paragraphe est omis par la traduction française.
[2] Circus : le Cirque, mais aussi abréviation de Cambridge Circus (rond-point), adresse supposée des Services de Renseignement britanniques.
[3] The spy…, p. 19 – Le paragraphe est omis par la traduction française. Mon amie Amy Ziering-Kofman, grande derridienne américaine à l’oreille fine, me confirme que « Leamas » a, en anglais, une prononciation très proche de « limace ».
[4] Jurgis Baltrusaitis, Aberrations, Légendes des formes, Paris, Perrin, 1957, p. 46. En sept dessins, le dessinateur J.-J. Granville, pseudonyme de Jean-Ignace Gérard (1803-1847), montre comment, en ouvrant l’angle formé par une verticale et la droite qui relie l’œil à la bouche, on passe de façon « réaliste » du visage d’Apollon à « celui » d’une grenouille.
Il répond ainsi à la fantaisie de Lavater (1741-1801) qui, mêlant l’évolutionnisme de Camper (1722-1789), fameux pour sa théorie de l’angle facial (« L’homme rejoint la bête avec l’inclination progressive de la droite tirée du front jusqu’à la lèvre supérieure »), à sa propre physiognomonie [science des caractères déduits des traits du visage], figure en 24 planches, le passage de la grenouille, le plus stupide des animaux, à Apollon, modèle de beauté grecque. Cf. J. Baltrusaitis, Aberrations…, pp. 32-33, 38. Vieille idée de l’animal dans l’homme comme essence ou comme terme de son destin : folie de la raison, rabattement de la métaphore sur elle-même pour produire du visible. – Granville est mort à l'asile d'aliénés de Vanves, en 1847.
[5] L’Espion…, p. 27 – traduction modifiée.
[6] « Cette affaire ne lui plaît pas, répondit négligemment Control. Il la trouve répugnante. Il en voit la nécessité mais ne veut pas en être. » Ibid., p. 56 – traduction modifiée.
[7] Ibid., pp. 33-34 – traduction modifiée Une remarque : avec ce nom de famille-là, Elizabeth Gold ne peut être que juive, a-t-on envie de dire. On revient plus loin sur les « Juifs » de Le Carré.
[8] Ibid., p. 38 – traduction modifiée.
[9] Dans le Don Juan de Molière (acte III, scène 1), on peut lire l’échange suivant entre Sganarelle et Don Juan :
« – Je veux savoir un peu vos pensées de fond. Est-il possible que vous ne croyiez point du tout au ciel ?
– Laissons cela.
– C’est-à-dire que non. Et à l’enfer ?
– Eh.
– Tout de même. Et au diable, s’il vous plaît ?
– Oui, oui.
– Aussi peu…
– … Mais encore faut-il croire quelque chose dans ce monde. Qu’est-ce donc que vous croyez ?…
– … Je crois que deux et deux sont quatre, Sganarelle, et quatre et quatre sont huit. »
Dans la scène suivante, Don Juan est arrêté par un pauvre qui lui demande l’aumône :
« – Je m’en vais te donner un louis d’or tout-à-l’heure, pourvu que tu veuilles jurer.
– Ah ! monsieur, voudriez-vous que je commisse un tel péché ?
– … A moins de cela, tu ne l’auras pas…
– … Non, monsieur, j’aime mieux mourir de faim.
– Va, va, je te le donne pour l’amour de l’humanité. »
L. Aimé-Martin, qui a préparé l’édition des Œuvres Complètes de Molière publiée par Lefèvre, à Paris, en 1874, précise : « Cette scène fut supprimée à la seconde représentation, dans la crainte qu’elle ne devînt un sujet de scandale pour les faibles ».
[10] L’Espion…, pp. 38-39 – traduction modifiée.
[11] Ibid., p. 39 – traduction modifiée.
[12] Idem.
[13] « … De manière générale, l'espion en littérature donne une image très trompeuse du travail d'un agent secret. Le prototype en est évidemment James Bond, l'agent 007, créé en 1958 par l'Anglais Ian Fleming, puis bientôt réabsorbé par les Américains, au cinéma. Ses aventures mettent en lumière certains aspects excitants de la profession, mais sans tenir compte le moins du monde des contraintes afférentes au réel métier du renseignement. L'espion en littérature est souvent un agent du « service action », fin prêt pour l'aventure, un noceur impénitent, qui arpente les salles des casinos de la Riviera, ou bien qui passe d'un avion à une voiture, avant de sauter dans un hors-bord. C'est une vraie caricature… Dans la réalité, le travail d'un agent de renseignement n'a rien à voir avec tout ça. » Pierre Marion [directeur de la DGSE de 1981 à 1982], « Pour Mitterrand, j'ai nettoyé la Piscine », Le Figaro Littéraire, 28 juillet 2005 (propos recueillis par Olivier Delcroix).
[14] L’Espion…, p. 45 – traduction modifiée.
[15] Ibid., p. 67 – traduction modifiée.
[16] Ibid., p. 81 – traduction modifiée.
[17] Idem – traduction modifiée.
[18] « [Leamas] était un homme en conflit avec lui-même, un homme qui n’avait eu qu’une vie, qu’une confession et qui avait trahi les deux. Peters avait déjà vu ça. Il l’avait vu même chez des hommes qui avaient radicalement changé d’idéologie qui, dans les heures intimes de la nuit avaient trouvé une nouvelle foi et, seuls, mus par la force de leurs convictions, avaient trahi leur vocation, leur famille et leurs pays… Ils en étaient tous deux conscients ; à tel point que Leamas avait refusé farouchement toute relation humaine avec Peters. Sa fierté le lui interdisait. Pour toutes ces raisons, Peters savait que Leamas lui mentirait, par omission peut-être, mais ne pourrait que mentir : par orgueil, par défiance ou même par perversité pure, inhérente à son métier. Et lui, Peters, aurait à pointer ces mensonges. Il savait aussi qu’avoir un professionnel en face de soi allait contre ses propres intérêts, parce que Leamas ferait le tri quand lui, Peters, ne voulait aucun tri. Leamas anticiperait le genre de renseignement que Peters recherchait et, ce faisant, pourrait laisser de côté un menu détail d’importance vitale pour les ‘évaluateurs’. » Ibid., pp. 79-80 – traduction modifiée.
[19] Ibid., pp. 99-100 – traduction modifiée.
[20] Ibid., p. 100 – traduction modifiée.
[21] « On dit que les condamnés à mort sont sujets à des moments d’exaltation soudains, et que pour eux, comme pour les papillons dévorés par les flammes, destruction et accomplissement sont simultanés. Sa décision prise, Leamas éprouva un sentiment semblable… Il perdait ses réflexes. Control avait raison. Il s’en était rendu compte l’année dernière, alors qu’il suivait l’affaire Riemeck… » The Spy…, p. 96 – paragraphe omis dans la traduction française.
[22] Peut-être faut-il rappeler aux mécréants que nous nous flattons généralement d’être, qu’un acolyte est un clerc chargé des offices subalternes et que l’acolytat est, dans l’Eglise catholique, le plus élevé des quatre ordres mineurs…
[23] L’Espion…, pp. 115-116 – traduction modifiée.
[24] Depuis la prise de Jérusalem par les Romains et la (deuxième) destruction du Temple, les Juifs observants n’accueillent pas d’instruments de musique dans leurs synagogues, pour marquer le deuil de leur souveraineté perdue. Seules exceptions : les instruments à cordes (d’abord la lyre puis la harpe, le violon, plus récemment), acceptés pendant les célébrations de mariages, ce qui expliquerait, selon certains, la prolifération du « juif violoniste » dans l’Europe centrale et de l’est au XXe siècle, de Chagall à David Oïstrakh, Leonid Kogan, Isaac Stern et Nathan Milstein en passant par Le violon sur le toit (d’après Tèvyé le laitier de Shalom Aleichem)…
[25] Cf. Raymond Aron, De Gaulle, Israël et les juifs, Plon, Paris, 1968.
[26] Au passage, on notera que sauver des actes odieux en y reconnaissant après-coup une motivation « noble », méconnue par ceux qui les ont commis, est une pratique vivace dont continuent de se réclamer sans complexe des « marxistes », frottés de « freudisme » pour faire bonne mesure. Par exemple, Slavoj Zizek, philosophe matérialiste dialectique et psychanalyste, directeur international du Centre for Advanced Studies in the Humanities de Birkbeck (Londres), crédite Eric Santner [professeur – juif ! – de Modern Germanic Studies à l’Université de Chicago] d’avoir élaboré une notion heuristiquement riche à partir des Thèses sur la Philosophie de l’Histoire de W. Benjamin, selon laquelle « une intervention révolutionnaire actuelle répète/rachète des tentatives ratées du passé. Ces tentatives valent comme ‘ symptômes ’ et peuvent être rétrospectivement rachetées par le ‘ miracle ’ de l’acte révolutionnaire. Elles ‘ ne sont pas tant des actions oubliées que des incapacités à agir passées, des incapacités à suspendre la force des liens sociaux inhibant les actes de solidarité avec les ’’autres’’ de la société ’.
Pour Santner, ces symptômes peuvent aussi prendre la forme de perturbations de la vie sociale ‘ normale ’ : par exemple, la participation dans les rituels obscènes de l’idéologie dominante. Selon cette façon de penser, Kristallnacht [La nuit de cristal, en 1938] – explosion de violence mi-organisée mi-spontanée contre des demeures, des synagogues, des boutiques et des particuliers – doit être considérée comme un carnaval au sens de Bakhtine [pour qui il s’agit d’un renversement symbolique et limité dans le temps des valeurs et hiérarchies par « le peuple »…], un symptôme dont la furie et la violence révèlent qu’il a été un essai de formation de défense, un masquage d’une incapacité antérieure à intervenir effectivement dans la crise sociale allemande. En d’autres termes, la violence même des pogromes était la preuve de la possibilité d’une authentique révolution prolétarienne, son énergie en excès marquant la réaction à la reconnaissance (inconsciente) de l’occasion manquée. » Slavoj Zizek, Lenin Shot at Finland Station, London Review of Books, vol. 27, n° 16, du 18 août 2005 – je souligne.
[27] J. Le Carré, « The United States of America has gone mad », article publié dans le Times, le 15 janvier 2003, pour protester contre le projet d’intervention des USA en Iraq, où l’on peut lire, entre autres : « La guerre imminente a été planifiée bien avant que Ben Laden eût frappé, mais c’est lui qui l’a rendue possible. Sans Ben Laden, la junte bushiste aurait encore à s’expliquer sur un tas d’affaires louches : sur la façon dont elle a été élue, pour commencer ; sur Enron ; sur son favoritisme éhonté en faveur des déjà-trop-riches ; sur son mépris sans borne pour les pauvres de la planète ; sur l’écologie et une foule de traités internationaux abrogés unilatéralement. Elle aurait aussi à expliquer pourquoi elle soutient Israël en dépit de son mépris permanent pour les résolutions de l’ONU.
Mais Ben Laden a opportunément envoyé tout ça sous le tapis d’un coup de balai. » – je souligne.
[28] A l’occasion de la sortie du film à Paris en 1977, après un an d’interdiction, une polémique a éclaté entre Claude Lanzmann et Gilles Deleuze : pour le premier, vouloir mettre en scène une putain maigre, son père nazi non repenti, son souteneur yougoslave et son protecteur anonyme et futur assassin, « A. le juif riche », promoteur immobilier sans scrupule, ne pouvait relever que d’une intention haïssable ; G. Deleuze ne l’a pas vu sous cet angle ; il a trouvé du mérite au film et, après avoir signé avec une cinquantaine de personnalités [!], une pétition dénonçant notamment l’« irresponsabilité consistant à ne pas [en] analyser la structure », et l’a défendu dans le Monde du 18 février 1977 (« Le juif riche », repris dans Deux régimes de fous, Paris, Minuit, 2003), estimant que le Schatten der Engel de Daniel Schmid n’était aucunement antisémite, ce qui l’a irrémédiablement brouillé avec C. Lanzmann – et quelques autres...
[29] « Fiedler avait passé toute la guerre au Canada. Leamas s’en souvenait maintenant… Ses parents étaient des réfugiés juifs allemands, marxistes, et c’est seulement en 1946 que la famille était rentrée au pays, désireuse de participer, quoi qu’il pût lui en coûter, à l’édification de l’Allemagne de Staline. » L’Espion…, p. 119 – traduction modifiée.
[30] Cf. Ma préface à Georges Clemenceau, Au pied du Sinaï (1898), Paris, Les Belles Lettres, coll. L’Arbre de Judée, 2000 [voir, dans cet espace, Portraits de Juifs fin de siècle 1, 2 et 3, mis en ligne les 21, 23 et 26 avril 2011].
[31] L’Espion…, p. 118 – traduction modifiée.
[32] « – N’oubliez jamais de montrer que vous les détestez, avait dit Control. Ils attacheront d’autant plus de valeur à ce qu’ils tireront de vous. » Ibid., p. 120 – traduction modifiée.
[33] Ibid., p. 120 – traduction modifiée.
[34] Ibid., p. 121 – traduction modifiée.
[35] Ibid., p. 124 – traduction modifiée.
[36] « – Quelle est votre philosophie ?
– Je pense que vous êtes des salauds, tous autant que vous êtes…
– C’est un point de vue que j’admets. Primaire, négatif et très stupide, mais c’est un point de vue. Et les gens du Cirque ?
– Je n’en sais rien. Comment le saurais-je ?
– Vous n’avez jamais discuté philosophie avec eux ?
– Non. Nous ne sommes pas des allemands… Je suppose qu’ils n’aiment pas beaucoup le communisme. » Ibid., pp. 131-132 – traduction modifiée.
[37] « – Je l’ai dit à Peters…Il est grotesque d’imaginer qu’une opération quelconque aurait pu être montée contre l’Allemagne de l’est à mon insu – à l’insu de l’organisation de Berlin. J’aurais forcément été au courant, hein !…
– Bien sûr… Vous l’auriez été forcément… » Ibid., p. 129 – traduction modifiée.
[38] Ibid., p. 144 – traduction modifiée.
[39] Idem.
[40] Ibid., p. 147 – traduction modifiée.
[41] « Fiedler marchait comme un somnambule tout droit vers le piège que Control avait tendu pour lui. C’était étrange [uncanny = d’une inquiétante étrangeté] de voir les intérêts de Fiedler et de Control peu à peu converger pour finalement s’identifier : à croire que, d’un commun accord, ils avaient adopté le même plan et que Leamas avait été chargé de l’exécuter. » Ibid., pp. 137-138.
[42] Ibid., pp. 147-148 – traduction modifiée.
Mauvaises fréquentations © Copyright 2005-2011 Richard Zrehen
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