lundi 16 février 2009

Un curieux penchant* (II)


… il faut encore intégrer au tableau, parce qu’ils lui appartiennent de plein droit, la culpabilité française à l’égard des Juifs et des « Arabes », plus ou moins tardivement avouée par les pouvoirs publics, la honte qui l’accompagne et le profond ressentiment à l’égard des Américains, tel qu’il se manifeste publiquement, depuis le début de la guerre froide (en fait, depuis la fin de la 2e guerre mondiale)… jusqu’à la veille de l’intronisation du président Barack Obama...

« L’histoire d’avant-hier est la moins connue ; celle d’hier la plus oubliée », Guizot[1].


I.- Genèse de la culpabilité française vis-à-vis des Juifs

Dès avant la fin 1940, on le sait, les Autorités françaises et leurs bras séculiers ont su faire preuve d’un zèle particulier dans la chasse aux Juifs, observants ou pas, et aux Israélites[2] que leur volonté d’assimilation aurait dû (!) mettre à l’abri, épurant et excluant avec méthode, avant de recenser, étoiler, dénoncer, spolier – avec l’appui d’une partie non négligeable de la population, prise d’une grande fièvre épistolaire[3] et bien décidée à participer à l’« aryanisation » des sociétés françaises –, arrêter et rassembler en vue de déportation, sans que l’Allemagne ait beaucoup à insister.

Il est de la nature des « origines » de toujours se dérober mais, pour ce qui est de notre affaire, on peut prendre le dernier tiers du XIXe siècle comme point de départ de cette spontanéité « patriotique ». L’histoire est connue (?), on se contente de la rappeler à grands traits, au risque de schématiser.

Le Second Empire défait, la IIIe République n’est pas capable de résister à la Prusse et perd l’Alsace-Lorraine[4] ; Lorrains et Alsaciens, pour rester français[5], montent en masse à Paris ou choisissent de s’établir de l’autre côté de la Méditerranée, et le sentiment anti-allemand se répand. Dès lors, la conquête de l’Algérie (possession de l’empire ottoman), entreprise directement en 1830 pour venger l’affront fait au consul de France Deval, frappé d’un coup d’éventail en 1827 par le Dey d’Alger, au cours d’une négociation commerciale difficile, en fait pour protéger notre marine marchande et nos littoraux contre les pirates « barbaresques » (ou corsaires ottomans, dont les plus célèbres sont les frères Barberousse) trafiquants d’esclaves[6], prend une nouvelle signification : celle d’une compensation territoriale et morale, voire d’un redressement de tort – exaltation lourde de menaces. Avant l’invasion arabe du VIIe siècle, l’Algérie berbère était terre d’évangélisation, et St Augustin, son fils le plus glorieux[7].

Moment difficile pour les soutiens d’une monarchie qui a su, quelque deux siècles avant, répliquant le « geste » espagnol du temps de la Reconquista, « homogénéiser » le pays en expulsant presque tous les protestants qu’elle n’avait pas tués, ces hommes de la droite catholique, qui ne pardonnent pas sa faiblesse à la République « usurpatrice », la « Gueuse » – abandonner la patrie de Jeanne d’Arc aux Allemands, c’est-à-dire aux Protestants ! – et regrettent leur roi ; qui ont été impuissants à empêcher Crémieux de faire passer le décret donnant la nationalité française aux Juifs d’Algérie (1870) et vu d’un très mauvais œil l’arrivée en nombre de financiers juifs allemands titrés, venus jouir en France des droits civiques (et de la vie) que l’Allemagne leur refusait[8].

Moment difficile pour les paysans arrachés à la terre et précipités dans les villes par la révolution industrielle, pour la gauche révolutionnaire, moins influencée par Marx – qui avait un gros problème avec ces Juifs d’Europe (quant aux Juifs orientaux…) dont il ne savait pas trop comment se désolidariser – que par Fourier[9], qui était d’avis de renvoyer les Juifs en Asie (!), Blanqui et Proudhon, confrontée au machinisme et à la force invisible et broyeuse du Kapital.


La richesse passe brutalement du visible – la « terre », la propriété foncière – à l’hyper abstrait, l’argent, pas celui des pièces et des lingots, celui de la Phynance, comme dira Jarry. Et ce n’est pas assez dire : l’argent en tant que déconnecté de son supposé équivalent, quelque marchandise ou encore la mystérieuse quantité de travail correspondant à un salaire. « L’argent, c’est le Réel » a enseigné le psychanalyste Jacques Lacan ; le Réel, pas le Symbolique, non ce qui « vaut pour » et peut se concevoir, mais bien ce qui prolifère et n’est pas représentable[10], ce qui déborde et excède les capacités d’accueil – c’est-à-dire de compréhension. Il est à noter qu’à peine accueilli dans la langue française (aux environs de 1870, apparemment) le mot « vampire » (de l’allemand vampir, emprunté au slave oupir), nommant un « cadavre qui sort la nuit de sa fosse [pour aller] sucer le sang des vivants, s’est vite vu doté d’un fort sens figuré, « personne qui s’enrichit du bien ou du travail d’autrui : Protée livré aux vampires d’agiotage (Fourier) »[11].

En résumé, la bonne société trouve que les barons juifs allemands sont vulgaires et abusent de leur argent pour la déplacer, voire la remplacer, rachetant châteaux, hôtels particuliers et équipages, quand ils ne l’humilient pas en donnant des fêtes somptueuses auxquelles elle se résout mal à ne pas assister ; les « prolétaires » pensent que les capitalistes (= Juifs, les plus en vue, les plus démonstratifs parce qu’ils ont du retard social à rattraper, ou encore = financiers « enjuivés ») qui s’enrichissent « sans rien faire » sont des vampires au sens « figuré » rappelé ci-dessus.


– Le « sang » dont se repaît le vampire est évidemment le signifiant qui va permettre au vieux mythe du « crime rituel » (selon lequel, au moment de la Pâque, les juifs sont censés mettre à mort un enfant chrétien pour recueillir son sang et pouvoir le mêler au pain azyme, ce pain « non levé » qu’ils ont coutume de manger pendant les 8 jours que dure cette fête célébrant la sortie d’Egypte) de retrouver une nouvelle jeunesse et une acception élargie, lui permettant d’enrichir l’imagerie de la Restauration Nationale, pleine de capitalistes arrogants et de « ploutocrates »-sangsues autour de 1930…

Ce mythe qu’on aimerait croire à peu près déconsidéré dans nos contrées sous sa forme primitive… François de Paul-Ulysse, comte de Ratti Menton, consul de France en Syrie dans la première moitié du XIXe siècle a pu lui donner crédit total dans sa guise d’origine lors de l’affaire dite de Damas, la disparition, le 5 février 1840, du père Thomas, supérieur des Capucins (et de son domestique), rapidement attribuée aux Juifs « qui auraient commis sur sa personne un crime rituel » et dont plusieurs mourront après avoir été torturés par la police désireuse d’obtenir leurs aveux[12].



Parallèlement, le sentiment « anti-boche » (l’Alboche, ou « tête épaisse » du lendemain de défaite devenant progressivement le « sale boche »), alimenté par des littérateurs et polémistes de talent (Daudet père et fils, Maurras, Maurice Barrès, etc. ) se généralise, tout comme le culte de la Pucelle d’Orléans, et, pour aggraver les choses, l’explosion du capitalisme et la libération de la formidable puissance de l’argent comme flux débordant – énergie débridée que les appareils de production/circulation ne peuvent canaliser longtemps : les éléments sont en place, dont le précipité (après quelques scandales politico-financiers auxquels sont mêlés certains des barons juifs de la finance, comme celui de Panama en 1889-1892[13]) va donner La France juive, La Cocarde, la glorification du sol, l’Affaire Dreyfus[14], la renonciation au particularisme des élites juives[15], la venue triomphale de Drumont en Algérie, l’élection de députés Drumontistes en cette même Algérie demandant l’abrogation du décret Crémieux, les émeutes anti-juives en cette même Algérie[16] (animées par le socialiste Max Régis, directeur du journal L’Anti-juif, et célébrées en pataouète – le pittoresque (!) parler des pieds-noirs – par le gavroche local, Cagayous[17]), l’illumination de Maurice Barrès découvrant, pendant l’épouvantable 1e guerre mondiale, que les Juifs de vieille souche et les récents naturalisés (Juifs allemands, Juifs polonais, Juifs russes, chassés de leur pays au lendemain de la Révolution des Soviets de 1905) s’étaient engagés en masse pour leur Patrie et contre le Teuton, et s’étaient admirablement comportés sur les champs de bataille[18] (payant un lourd tribut du sang que les survivants et leurs descendants opposeraient en vain, quelque 20 ans plus tard, à la police de Vichy, impassible devant leur qualité d’anciens combattants et leurs médailles), la Révolution Nationale en France métropolitaine, et, ultimement les lois et le zèle anti-juifs du maréchal Pétain et de ses partisans les plus enthousiastes[19] – et tous n’étaient pas de « droite », loin s’en faut.

Tout cela, trop brièvement dit, pour rappeler que les Français, tous les Français, pour autant qu’ils ont pour « ancêtres communs » ces « Gaulois » mythiques des manuels d’histoire d’avant 1975 – ce qu’impliquent et la citoyenneté par naissance et la citoyenneté par naturalisation –, ont à subir le poids de l’héritage, Français « issus de l’immigration » y compris. Se retrancher, par exemple, derrière des caractéristiques « ethniques » visiblement distinctes de celles prêtées à ceux que César a autrefois vaincus pour refuser cette « filiation » et cette charge tout en jouissant de la nationalité française, est très malvenu, est se méprendre gravement sur la nature de celle-ci : un contrat, avec droits et obligations, pas une appartenance bio-politique sans contrepartie. Tous, donc, ont à assumer cet héritage-là : le tort fait aux Juifs de France, privés par Vichy de la citoyenneté, du secours de la loi, de leurs biens et, pour beaucoup, envoyés à la mort. Et reconnaître une faute est toujours difficile, d’autant plus qu’on ne l’a pas commise directement. Quant à admettre qu’il y a l’assumer…



Deuxième volet de l’hypothèse exposée plus haut : le pro-« palestinisme » français a beaucoup à voir avec cet héritage-là – ce qu’on développe plus bas.

A suivre…


*Une première version (écourtée) de ce texte a été publiée dans le n°14 d’Outre-terre (2006), revue française de géopolitique, éditions Erès, sous le titre « Le complexe de Tulkarem ». Copyright © Richard Zrehen, 2006, 2009.


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Notes :

[1] Cité par Jacques Chastenet, La France de M. Fallières, Paris, Fayard, 1949, p. 11.

[2] Emules de ces Juifs lettrés, républicains et universalistes (au nombre desquels les frères Joseph, Salomon et Théodore Reinach, les frères Arsène et James Darmesteter, Salvador Lévi, Gaston Bach, le rabbin Louis-Germain Lévy) qui ont choisi de se nommer « Israélites » (par référence à l’avant conquête du pays de Canaan), de ne plus reconnaître l’autorité du Talmud (sans pour autant abandonner son étude, A. Darmester lui consacrant un brillant essai paru en 1888), de récuser la Loi et ses commandements, de renoncer au gros des pratiques, de se référer aux Prophètes (J. Darmesteter fera paraître en 1892 Les prophètes d’Israël), qui ont inventé un judaïsme du cœur, laïcisé et désorientalisé, le judaïsme libéral, et s’opposent systématiquement aux « Juifs » restés attachés à la Tradition. Cf. Georges Clemenceau, Au pied du Sinaï, op. cit., p. XIII & pp. XV-XXIV.

[3] Cf. Antoine Lefébure, Les Conversations secrètes des Français sous l'Occupation, Paris, Plon, 1993.

[4] « Bien peu destructive, bien peu sanglante auprès de ce que l’univers connu depuis, cette guerre [de 1870] a paru, aux Français contemporains, un cataclysme inouï.

Les souvenirs de 1814 et de Waterloo avaient été oubliés ; on ne se rappelait que les récentes et victorieuses campagnes de Crimée [contre la Russie] et d’Italie [contre l’Autriche] ; des hécatombes révolutionnaires et impériales on n’évoquait que l’idéal français conquérant l’Europe ; on sentait son cœur battre quand on contemplait la Colonne Vendôme ; on était assuré d’être, par les armes comme par l’esprit, la Grande Nation.

La défaite tomba, en coup de foudre, sur ces illusions. La France vaincue, et non pas même par une coalition, mais par de médiocres Etats germaniques, des principautés de Gerolstein élargies ! En dépit de l’évidence, beaucoup, parmi les plus « avancés » politiquement, se refusèrent d’abord à le croire et la Commune parisienne fut, pour une part, la réaction d’un amour-propre atrocement blessé… », Jacques Chastenet, La France de M. Fallières, op. cit., p. 22 – nous soulignons.

[5]« Après 1871, l’émigration vers la France avait vidé le pays de tous les éléments intransigeants, qui refusaient de reconnaître, fût-ce par leur simple présence, l’état de fait créé par le traité de Francfort [signé entre la France et l'Allemagne le 10 mai 1871]…

Pour presque toutes les familles bourgeoises du Haut-Rhin, le refus de tout contact avec les Allemands était un principe dont on ne se départait pas ; et, dans la maison paternelle, aux portes de l’usine, personne n’aurait eu l’idée que cette règle pût être mise en question, si, de la maison d’en face, l’ombre du grand-père, Jean Schlumberger, n’eût pesé sur bien des entretiens à mots couverts. Ce grand-père avait été nommé président du petit parlement, dit Landesausschuss, qui siégeait à Strasbourg et qui conservait à l’Alasace-Lorraine un semblant de représentation politique. Une telle fonction n’impliquait pas un ralliement total […] mais elle manifestait clairement une vocation de bonne entente. On pouvait faire valoir, non sans apparence de raison, que cette attitude conciliante était le seul moyen de sauver l’individualité au sein de l’empire allemand ; qu’une résistance intransigeante n’aurait d’autre résultat qu’une germanisation infiniment plus brutale, avec annexion pure et simple au Palatinat ou à la Prusse. Mais ces arguments ou excuses, quand les enfants en entendaient quelque chose dans les propos, n’étaient guère de nature à convaincre leur esprit ; et comme le vieil homme était peu démonstratif, peu soucieux d’éveiller leur intérêt ou leur tendresse, ils n’étaient que trop disposés à voir en lui le champion d’une cause détestée…

Malgré ses préférences qui l’eussent porté vers les sciences pures, Paul Schlumberger [fils de Jean], le père de Conrad [futur géophysicien et co-fondateur de la Société de Prospection Électrique qui deviendra, après sa mort, Schlumberger LTD, leader mondial des services pour l’industrie pétrolière], s’était laissé pousser vers l’industrie. Il en exprimait souvent son regret et se montrait résolu à ne pas exercer sur ses fils la pression qui avait pesé sur lui. Dans de telles conditions, comment l’ême d’un enfant généreux eût-elle longuement balancé entre les deux pôles d’attraction qui le sollicitaient, celui de France et celui d’Alsace ?…

Ni lui ni ses frères ne se souvinrent d’avoir jamais hésité… Qu’ils partiraient, qu’ils abandonneraient les places qui les attendaient dans le patronat des usines, cela leur semblait aller de soi… », Jean Schlumberger, Conrad Schlumberger, Paris, Copyright © Jean Schlumberger, 1949, pp. 11-12-1314-16-17 – nous soulignons.

[6] Ces pirates de la « Côte Barbare » (ou berbère) faisaient souvent des razzias (ou raids) sur les villes européennes situées au bord de la mer Méditerranée (ils sont aussi allés en Islande et jusqu’en Amérique) pour capturer des chrétiens et les vendre comme esclaves sur les marchés du Maghreb. Du XVIe au XIXe siècles, ils auraient enlevé plus d’un million de personnes. L’Enlèvement au sérail de Mozart fait écho à cela, tout comme L’Indomptable Angélique d’Anne et Serge Golon, portée à l’écran en 1967 par Bernard Borderie, Michèle Mercier incarnant l’héroïne…

[7] Cf. R. Zrehen, « Ecrit au soleil », in Les Pieds-Noirs, Paris, Philippe Lebaud éd., 1982, pp. 104-105 ; Louis Bertrand, St Augustin, Paris, Mame, 1913 et Sanguis Martyrum, Paris, Fayard, 1918.

[8] On connaît encore Drumont, on a oublié Gyp, et c’est grand dommage : la comtesse de Martel (1850-1932), arrrière-petite-nièce de Mirabeau, écrivain enjoué et spirituel proche des milieux boulangistes mais appréciée par Anatole France, a écrit sous ce pseudonyme de très nombreux romans de mœurs, publiés par Calmann-Lévy, qui ont connu un franc succès de son vivant ; elle a aussi publié, dans d’autres maisons d’édition, des romans polémiques tendancieux, par exemple Le baron Sinaï (1897) ou Israël (1898), dans lesquels elle brocarde à l’envi ces Juifs parvenus à l’accent tudesque prononcé, aux manières grossières et à l’ostentation détestable, nantis de maîtresses voyantes et d’épouses amorales et trop richement parées ; dans lesquels elle brocarde aussi ces aristocrates français appauvris qui ne dédaignent pas de fréquenter et flatter les précédents, de courtiser et séduire leurs épouses, dans l’espoir d’en récolter quelque avantage matériel…

[9] « … Durant tout le XIXe siècle, le seul courant antisémite persistant et vigoureux fut de caractère socialiste : Charles Fourier, son disciple Adolphe Toussenel (auteur en 1845 du Juif, roi de l’époque : histoire de la féodalité financière), Auguste Blanqui, Proudhon, le communard Gustave Tridon (auteur du Molochisme juif, ouvrage posthume paru en 1844), Benoît Malon, tous – comme Marx – exécraient dans les juifs les auteurs par excellence du mal social et économique. C’est partiellement dans la ligne de cette tradition socialiste, et en particulier du livre de Toussenel, que Drumont publia en 1886 La France juive... », Michael Sutton, Charles Maurras et les catholiques français, 1890-1914, Nationalisme et Positivisme, tr. G. Mosseray, Paris, Editions Beauchesne, 1994, pp. 48-49.

[10] Combien approprié, ici, de se tourner vers « le » philosophe national pour exposer la différence entre concevoir et représenter : « … quoique suivant la coutume que j'ai de me servir toujours de mon imagination, lorsque je pense aux choses corporelles, il arrive qu'en concevant un chiliogone [polygone régulier possédant 1 000 côtés], je me représente confusément quelque figure, toutefois il est très évident que cette figure n'est point un chiliogone, puisqu'elle ne diffère nullement de celle que je me représenterais, si je pensais à un myriagone [polygone régulier possédant 10 000 côtés], ou à quelque autre figure de beaucoup de côtés ; et qu'elle ne sert en aucune façon à découvrir les propriétés qui font la différence du chiliogone d'avec les autres polygones », Descartes, Méditations métaphysiques, VI.

[11] Nouveau Larousse Illustré, tome 7, Paris, 1900, p. 1 216.

[12] Cf. André Chouraqui, L’Alliance Israélite Universelle, op. cit., pp. 16-18 ; Ronald Florence, Blood Libel, The Damascus Affair 1840, Other Press, New York, 2006.

[13] Impliquant, entre autres, le baron Jacques de Reinach, qui sera retrouvé mort de congestion cérébrale à son domicile en 1892 ; Emile Zola s’en inspirera dans Paris (1898) pour son baron Duvillard. Cf . notre préface à Georges Clemenceau, Au pied du Sinaï (1898), rééd. Les Belles Lettres, Paris, 1999, pp. XI-XII.

[14] Une remarque : le très courageux et très malheureux capitaine Alfred Dreyfus, patriote si peu juif et tellement « israélite », plutôt effacé, était un « traître » par destination. Alsacien, à cheval sur la frontière, entre 2 langues (en fait, 3, parce qu’il y a aussi l’« alsacien »), il ne pouvait pas ne pas être un membre de cette 5e colonne dont on parlerait un peu plus tard, un agent des « boches » honnis. On ne voit pas comment un Juif de Bordeaux ou du Comtat Venaissin aurait pu être amené à jouer ce rôle, comment il aurait pu cristalliser sur lui tant de haine a priori.

[15] Cf. note n° 2.

[16] Cf. Pierre Hebey, Alger 1898. La Grande Vague Antijuive, Paris, Nil, 1996, Abraham H. Navon, Joseph Pérez (1925), rééd. Les Belles Lettres, Paris, 1999 et R. Zrehen, Bad days in Algiers, Constantine, Oran, Chronique des Belles Lettres, 25 janvier 2008, www.lesbelleslettres.com/info/?fa=text204.

[17] « Vous dire Cagayous, quel escroc qu’il était, raciste mais presque sympathique quand même… », Roland Bacri, « Le patouète », in Les Pieds-Noirs, op. cit., p. 91. - Cagayous, petit voyou bagarreur, a été inventé par un pied-noir, Victor Robinet (1862-1930), qui signait Musette.

En 1898 paraît Cagayous antijuif. Extrait de la préface : « Cagayous antijuif ! Certes, il l'est depuis la plante des pieds jusqu'à la racine des cheveux. Il l'est jusqu'aux replis secrets de l'âme ; il l'est d'essence, de religion, de vocation ; il l'est totalement. On ne pouvait, d'ailleurs, concevoir autrement cette fleur sauvage du pavé algérien, poussée dans le salpêtre et le crottin, sous une flambée de soleil. » Cagayous antijuif, Alger, Ernest Mallebay éditeur, 1898, p. 5, cité par Paul Siblot, « 'Cagayous antijuif'. Un discours colonial en proie à la racisation », Persée, 1987, vol. 15, n° 1, p. 61 (http://www.persee.fr).

[18] Ainsi, le rabbin alsacien Bloch, fauché alors même qu’il tendait un crucifix à un soldat agonisant, figure exemplaire retenue par Barrès dans Les familles spirituelles de la France, (Paris, Émile-Paul, 1917), qui reconnaît dans les Juifs, les traditionalistes, les protestants et les socialistes autant de composantes du génie national, à l’opposé de Maurras qui en fait les « quatre États confédérés » de l'Anti-France...

[19] Pour mémoire : « Un statut des Juifs, élaboré par le Gouvernement de Vichy, a fait l'objet d'une loi du 3 octobre 1940, renforcée principalement par celle du 2 juin 1941.

Selon l'article 1er de la loi du 3 octobre 1940 modifiée par celle du 2 juin 1941, est considéré comme Juif :

" 1°- celui ou celle, appartenant ou non à une confession quelconque, qui est issu d'au moins trois grands-parents de race juive, ou de deux seulement si son conjoint est lui-même issu de deux grands-parents de race juive.

" Est regardé comme étant de race juive le grand-parent ayant appartenu à la religion juive ;

" 2°-Celui ou celle qui appartient à la religion juive, ou qui y appartenait le 25 juin 1940, et qui est issu de deux grands-parents de race juive.

" La non appartenance à la religion juive est établie par la preuve de l'adhésion à l'une des autres confessions reconnues par l'Etat avant la loi du 9 décembre 1905.

" Le désaveu ou l'annulation de la reconnaissance d'un enfant considéré comme juif sont sans effet aux regard des dispositions qui précèdent ".

Tous devaient faire apposer la mention " Juif " sur leur carte d'identité.

Les citoyens français Juifs sont exclus de la haute fonction publique. Les autres emplois publics ne leur sont accessibles que s'ils sont titulaires de certaines décorations ou citations militaires.

Ils sont aussi exclus de l'enseignement et de la magistrature.

Les Juifs ne peuvent exercer une profession libérale, commerciale, industrielle ou artisanale que " dans les limites et les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ", ce qui se traduisait généralement par l'établissement de quotas, etc. », Conclusion du Rapport n° 353 (1999-2000) de M. Jean-Pierre Schosteck, portant sur une « Proposition de loi relative aux Justes de France », fait au nom de la commission des lois, déposé le 24 mai 2000 au Sénat, www.senat.fr



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