Selon le journal médical britannique The Lancet, cité par Colleen Carroll Campbell, écrivant dans le St Louis Post-Dispatch (29 mai 2008), « il y aurait un demi million d’avortements par an en Inde – en raison du sexe du fœtus… » Depuis que l’imagerie par résonance a permis aux futurs parents de connaître le sexe de leurs enfants avant la naissance, la proportion garçons/filles a significativement changé : de 962 filles pour 1000 garçons en 1981, elle est passée à 927 filles pour 1000 garçons en 2001 – et rien ne laisse à penser que le courant s’est inversé depuis.
La disproportion serait encore plus prononcée dans les villes les plus aisées, où l’accès plus facile aux technologies modernes et les campagnes du gouvernement en faveur des familles restreintes se seraient combinés à la préférence ancestrale pour les garçons… : en 2001, on y compterait de 700 à 800 filles pour 1000 garçons….
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Dans Disappearing Daughters: The Tragedy of Female Fœticide (Penguin Books India, 2007), la journaliste Gita Aravamudan écrit – un peu excessivement (?) : « L’infanticide féminin s’apparente aux meurtres en série… à l’Holocauste ( !). Un genre entier est en train d’être exterminé… ».
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Le problème concerne toute l’Asie où, selon un rapport récent du Fonds des Nations Unies pour la Population, il « manquerait » 60 millions de filles, en raison de l’avortement en fonction du sexe, de l’infanticide et de la négligence. L’exemple le plus flagrant est celui de la Chine, où la politique « un seul enfant par famille », brutalement appliquée, a « produit » une proportion nationale de 850 filles pour 1000 garçons – dans certaines provinces, on compterait 770 filles pour 1000 garçons…
Une même tendance commence à s’observer aux USA. Analysant (mars 2008) des données du recensement de 2000, 2 économistes de Columbia University, Douglas Almond et Lena Edlund, en se centrant sur le sexe des enfants chinois, coréen et indo-asiatiques nés aux USA, ont « trouvé des preuves d’une sélection des sexes, très probablement au stade pré-natal. »
Le sexe du premier enfant dans ces familles est celui, naturel, de 1,05 garçon pour une fille, si le premier né est un garçon, phénomène qui se reproduit pour les enfants qui suivent. Si le premier-né est une fille, la proportion sera de 1,17 garçon pour une fille… Après 2 filles, on comptera 1,5 garçon pour une fille…
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Le 28 mai 2008, The Sun, journal populaire (!) consacre un article à un couple britannique qui aurait abandonné ses jumelles, « obtenues » par fertilisation in vitro, « parce qu’elles n’étaient pas du bon sexe ». Le père, 72 ans, et la mère, 59 ans, d’origine indienne et résidant à Birmingham, s’étaient rendus en Inde pour avoir accès à un traitement contre la stérilité auquel il n’auraient pas pu prétendre au Royaume-Uni, en raison de leur âge.
Les jumelles, délivrées par césarienne, sont nées à la mi mai au Wolverhampton’s New Cross Hospital ; après quoi les parents, restés anonymes, auraient dit à l’équipe médicale que « les bébés n’étaient pas du bon sexe ».
Le Sun ajoute que le père aurait ensuite demandé aux médecins combien il faudrait de temps à sa femme pour être en état de retourner en Inde, afin d’y subir un nouveau traitement contre la stérilité, dans l’espoir d’avoir un garçon « pour perpétuer » le nom…
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Le 29 mai 2008, la section West-Midlands du National Health Service dément l’information, confirmant les circonstances de la naissance des jumelles et précisant qu’elles ont été transférées à Birmingham, plus près du domicile de leurs parents. « Les parents rendent visite à leurs filles, qui sont suivies à l’hôpital. »
Un porte-parole du NHS a refusé de donner plus de détails ou de dire quelle était la fréquence des visites des parents. Le Sun avait prétendu que les parents n’avaient jamais rendu visite à leurs filles.
Les Services sociaux de Birmingham et la police de West-Midlands disent ne pas être impliqués dans cette affaire…
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1er juin 2008. Une dépêche d’Associated Press en provenance du Caire, reprise par CNN, rapporte que, dans un enregistrement mis en ligne (en avril 2008) par un site web islamiste, on peut entendre Ayman al-Zawahiri, n° 2 d’Al-Qaïda, répondre à des questions posées par des sympathisants, notamment des femmes, et dire à l’une d’entre elles : « Il n’y a pas de femme dans les groupes de djihadistes… Le rôle d’une femme se limite à tenir la maison et à élever les enfants d’un djihadiste… »
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A en juger par le contenu des discussions (sur les sites qui diffusent les vidéos d'Ossama Bin Laden) à la suite de cette intervention, toutes les auditrices ne sont pas entièrement de cet avis.
A'eeda Dahsheh, par exemple, palestinienne résidant au Liban, mère de quatre enfants, qui dit être d’accord avec Ayman al-Zawahiri et a choisi de rester à la maison pour élever ses enfants comme forme de Djihad : elle soutient toute femme qui choisirait plutôt de participer à des attentats.
Ou bien encore une femme, elle signe Rabeebat al-Silah (= compagnon d’armes), qui déclare avoir écouté 10 fois le discours du n°2 d’Al-Qaïda : « Combien souvent j’ai souhaité être un homme… Quand Sheikh Ayman al-Zawahiri dit qu’il n’y a pas de femme dans Al-Qaïda, ça m’attriste et me blesse… J’ai eu l’impression que mon cœur allait exploser dans ma poitrine… Je me sens impuissante… »
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Beaucoup d’internautes utilisant des pseudonymes, il est impossible de vérifier les identités et les endroits d’où les messages proviennent ; ils paraissent néanmoins crédibles aux spécialistes.
« L’Internet est le seul endroit où les femmes, souvent couvertes de voiles noirs et confinées dans leurs maisons, peuvent ‘respirer’ » dit Ossama 2001, qui ajoute : « Les paroles d’Ayman al-Zawahiri ont rouvert de vieilles blessures… et j’ai plaidé auprès de Dieu pour qu’il libère les femmes de sorte qu’elles puissent participer au Djihad… »
« Ces femmes sont des sympathisantes d’Al-Qaïda qui ne seraient pas à l’aise s’il leur fallait s’exprimer en présence d’hommes ou de personnes n’appartenant pas à leur cercle », selon Dia'a Rashwan, spécialiste des mouvements islamistes et expert en terrorisme au Al-Ahram Center for Political and Strategic Studies du Caire - qui disait, un an après les attentats du 11 septembre : « L'implication de Bin Laden n'est pas prouvée... » « Internet est l’endroit idéal pour faire connaître leurs vues, en étant cachées du monde… », commente-t-il.
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Les experts estiment qu’il n’y a pas de femme au sommet de la hiérarchie d’Al-Qaïda, mais au-delà du noyau dur...
Des femmes appartenant à la branche irakienne d’Al-Qaïda ont perpétré ou tenté de perpétrer au moins 20 attentats à la bombe depuis 2003. En 2007, des membres d’Al-Qaïda soupçonnés d’entraîner des femmes à l’utilisation de ceintures d’explosifs ont été arrêtés en Irak, en 3 circonstances, selon les Autorités militaires américaines.
Le Hamas n’est pas opposé à la présence de femmes dans ses rangs, contrairement à Ayman al-Zawahiri.
« Nombre de filles avec lesquelles je discute… veulent porter des armes. Elles vivent avec cette grande frustration (!) », dit Huda Naim, membre du Hamas et député palestinien de Gaza. « Nous n’avons pas d’aile militante spécifique pour les femmes… ce qui ne veut pas dire que nous privons les femmes du droit d’aller au Djihad… »
11 femmes palestiniennes, au moins, ont lancé des attaques-suicides en Israël dans les 3 dernières années.
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Des hommes aussi ont réagi aux propos d’ Ayman al-Zawahiri. L’un deux, Hassan al-Saif, s’étonne : « Notre Sheik veut-il dire qu’il n’est pas utile de se servir de femmes dans notre Djihad en cours ? Pourquoi ? »
Il était en minorité...
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Sources :
Colleen Carroll Campbell, « The bitter irony of sex-selective abortion », St Louis Post-Dispatch, 29 mai 2008.
UNFPA, « Girls Gone Missing in Asia », video.unfpa.org/octobre 2007.
Douglas Almond and Lena Edlund, « Son-biased sex ratios in the 2000 United States Census », PNAS, 31 mars 2008.
« IVF twins – NHS trust disputes claims »,
« Al-Qaeda faces gender debate », CNN.com/world, 1er juin 2008. May 29 mai 2008.
Kathryn Jean Lopez, « Hate to Win ? Talking with journalist Kenneth Timmerman », National Review, 21 novembre 2003.
Illustrations :
Spice Girls 2, copyright Patrick Jelin.
Signe, copyright Alain Bellaïche.
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