jeudi 2 octobre 2008

Promotion d’automne (1)

Un disque sombre et farcesque, un livre dynamisant, œuvres d’amis chers et inventifs, pour mettre la Crise en perspective …


1) Keio Line, par Richard Pinhas et Merzbow (pseudonyme du musicien bruitiste Masami Akita), A Dirter Release, triple record set DPROMTLP 67, 2008. – Triple album enregistré les 25 et 26 octobre 2007 à Tokyo.


Richard Pinhas, musicien et philosophe, est une créature hybride : de soleil et de brume, d’enthousiasme et de scepticisme, d’assertivité et de retrait. Il fréquente Nietzsche mais aussi Wagner, Spinrad et Hendrix ; il célèbre l’immanence que lui a enseignée Deleuze, dette infinie et assumée – transcendance !

Créature hybride et tendue, entre la Turquie de son père, ancienne terre d’accueil des Juifs rejetés d’Espagne, et l’Allemagne de sa mère qui a fait disparaître leurs cousins « européens » là où elle l’a pu. Distendue, plutôt : entre cantillation – cette façon de lire l’hébreu des Ecritures si proche du Sprechgesang de Schönberg – et concept, sensibilité et connaissance, imagination et théorie. De là vient qu’il est souvent espiègle avec sérieux, qu’il s’essaie à modaliser la théorie, à donner à entendre les sons imperceptibles qui se tiennent en réserve dans la gamme tempérée, qu’il fait une musique intense : dense et vibratoire.

De là vient qu’il trompe son monde, à la manière de Dylan apparaissant en rocker avec une guitare électrifiée, en juillet 1965, au Newport Folk Festival – et se faisant huer. Richard Pinhas, lui aussi, se sert d’une guitare électrique (et d’ordinateurs), pour moduler indéfiniment la brève-longue moléculaire – il a, au fond, peu de patience pour la mélodie, et c’est toujours une surprise quand un de ses titres est repris par un musicien évoluant dans un autre horizon.

Croyant le flatter, on a souvent pris Richard Pinhas pour un précurseur de Kraftwerk. Après plus de 20 albums (aux couvertures souvent inquiétantes, grâce à Dominique Fury et Patrick Jelin, notamment), il est clair que la parenté est à chercher du côté de Brian Eno et de Karlheinz Stockhausen. Redoutable.


Prix : 29 €



2) Usages contemporains de la phénoménologie, par François-David Sebbah et Jean-Michel Salanskis, Sens&Tonka, 2008. Deux auteurs de sensibilité différente dépeignent la situation actuelle de la phénoménologie.


Avant-propos :


[…] Il y a d’abord eu le séminaire « Usages contemporains de la phénoménologie » que nous avons co-organisé au Collège international de Philosophie [...] Nous avions le projet de tenter de nous orienter parmi les manières variées de faire de la phénoménologie, ou de l’étudier, ou de la rencontrer, ou d’en appliquer la méthode.

[…] La deuxième étape fut celle du colloque « Usages contemporains de la méthode phénoménologique », qui s’est tenu à Clermont-Ferrand en avril 2002… organisé avec Renaud Barbaras […] Première occasion de commencer à prendre du recul vis-à-vis de l’expérience du séminaire… et de chercher à expliciter ce que nous en avions tiré, comment notre « vision » de la phénoménologie et de ses enjeux avait pu bouger.

La troisième étape fut le projet du présent livre qui devait nous permettre d’approfondir cette réflexion […] Ouvrage à deux voix radicalement indépendantes. Nous n’avons pas cherché à « construire » une homologie de nos deux contributions […] au contraire, [à] exploiter la différence de sensibilité entre nous qui reflétait, croyions-nous, une bivalence interne à la phénoménologie propice […] à un héritage qu’on pourrait dire « littéraire » et comme aimanté par l’en-deçà ou l’au-delà – du positif, de l’objet, voire de l’être ou de la présence – aussi bien qu’à un héritage mathématique et fondationnel […]

Le plan adopté fut donc de mettre en regard, d’abord, deux manières d’envisager le dialogue ou la rencontre de la phénoménologie et de la science (les sciences cognitives contemporaines pour F.-D. Sebbah et la mathématique pour J.-M. Salanskis), puis deux manières de lire les textes phénoménologiques (Derrida, Henry, Levinas et Marion pour F.-D. Sebbah, Husserl et Heidegger pour J.-M. Salanskis), puis, enfin, deux manières d’envisager un avenir de la recherche en phénoménologie (dans la lignée de la « phénoménologie française » qu’on peut dire en un sens d’« écrivain » pour F.-D. Sebbah, comme éthanalyse pour J.-M. Salanskis).

[…] C’est sans doute l’attachement à ce que la phénoménologie exprime d’une exigence radicale de philosophie qui fait le fil rouge de ce parcours croisé où sont rencontrés [plusieurs] usages de la phénoménologie – dont certains s’assument légitimement comme non-philosophiques.


Prix : 19 €


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