mercredi 30 juillet 2008

Echauffement climatique…

Le 24 juillet 2008, M. Barack Obama, candidat du parti Démocrate aux prochaines élections présidentielles américaines, prononce à Berlin un discours intitulé « A World that Stands as One ».

Extraits :

« … Le XXe siècle nous appris que nous partageons la même destinée, mais le XXIe siècle nous a révélé un monde plus étroitement lié qu’il ne l’a jamais été dans l’histoire des hommes.

La chute du Mur de Berlin a apporté un espoir nouveau. Mais cette grande proximité a donné naissance à de nouveaux dangers – des dangers qui ne peuvent pas être contenus à l’intérieur des frontières d’un pays ou par la taille d’un océan.

Les terroristes du 11 septembre ont comploté à Hambourg, se sont entraînés à Kandahar et à Karachi avant de tuer des milliers de personnes originaires de toutes les parties du globe sur le sol américain.

Alors même que nous (!) parlons, des automobiles à Boston et des usines à Beijing [Pékin] font fondre la calotte glaciaire dans l’Arctique, reculer les zones côtières dans l’Atlantique et provoquent la sécheresse dans les fermes, du Kansas au Kenya… »

*

Le même jour, le Barents Observer publie un article intitulé « More ice than expected in parts of the Arctic ».

Extraits :

« De nouvelles données enregistrées par l’Institut Météorologique Norvégien montrent qu’il y a plus de glace qu’il n'est normal dans les eaux de l’Arctique au nord de l’archipel Svalbard [à 1000 km du Pôle Nord, patrie de l’ours blanc et destination touristique très courue].

Généralement, les eaux sont libres au nord de l’archipel en juillet. Mais, selon les relevés effectués cette année, la région est couverte de glace, déclare l’Institut Météorologique Norvégien, dans un communiqué de presse daté du 21 juillet 2008.

A la mi-juillet, le navire scientifique Lance et le bateau suédois MV Stockholm ont été pris dans les glaces dans cette zone, et ont dû faire appel aux Garde-Côtes norvégiens pour être libérés.

La découverte de glace dans cette région a surpris les chercheurs, beaucoup étant convaincus que le Pôle Nord lui-même serait vierge de glace en septembre prochain… »

**

Sources :

James Taranto, « Well, Maybe Not as We Speak », Wall Street Journal, 28 juillet 2008.

« Berlin's Victory Column in Tiergarten Park, Berlin, Germany », Real Clear Politics, 24 juillet 2008.

« More ice than expected in parts of the Arctic », Barents Observer, 24 juillet 2008.


Illustrations :


Prophète à Tel Aviv ? copyright Patrick Jelin.

Klein, copyright Alain Zimeray.

jeudi 24 juillet 2008

Re-Effets d’optique...

Le 12 juillet 2006, quelques heures après le kidnapping, à la frontière nord d’Israël, de 2 réservistes israéliens, Eldad Regev et Ehud Goldwasser, par le Hezbollah, son chef, le Sheikh Hassan Nasrallah, intervient en direct sur Al Manar TV et déclare, notamment : « … Je remercie Dieu pour la victoire, le jihad et les résultats… Aujourd’hui est un jour de loyauté envers Samir Kuntar et le reste des prisonniers libanais en Israël… Regev et Goldwasser sont en sécurité et ne seront libérés qu’en échange de tous les prisonniers libanais et de milliers de prisonniers en Israël… »

*

Samir Kuntar ?

Samir Kuntar, « libanais d’origine druze de la montagne libanaise, [qui] s’est engagé, à l’âge de 16 ans, dans la lutte de libération… [et] est parti, avec ses compagnons palestiniens, vers la Palestine occupée, en 1978 [!], pour prendre des otages et les échanger contre la libération de combattants faits prisonniers par Israël… », selon nasr-moqawama.blogspot.com [« dié à tous les peuples arabes en lutte pour leur Liberté »] du 19 juillet 2008.

Samir Kuntar qui, à la tête d’un commando arrivé par mer du Liban, « a attaqué un groupe d’immeubles à Nahariha en 1979, tuant un père et sa fille (cette dernière en lui fracassant le crâne)… », selon BBC News (27 juillet 2006), emprisonné à vie, depuis, en Israël.

– Selon Craig S. Smith, écrivant dans le New York Times (16 juillet 2008), « le raid a horriblement (!) mal tourné (!!), avec 5 morts, une communauté terrorisée et une nation traumatisée. Deux enfants israéliens et leur père sont au nombre des morts… »

*

Le 27 juillet 2006, le Wall Street Journal rapporte le témoignage de Smadar Haran Kaiser, qui a survécu à l’attaque du 22 avril 1979.

Extraits :

« Ca avait été un chabat paisible. Mon mari, Danny [28 ans] et moi avions pique-niqué avec nos 2 petites filles, Einat, 4 ans, et Yael, 2 ans, sur une plage proche de notre immeuble à Naharya, sur la côte au nord d’Israël, à 10 km de la frontière libanaise.

Vers minuit, tout le monde dormait dans l’appartement… Des coups de feu et l’explosion de grenades nous ont réveillé au moment où [des] terroristes faisaient irruption dans notre immeuble…

Je les entendais à l’étage au-dessus… J’ai ouvert la porte [et] avant que la lumière du hall ne s’éteigne, ils se sont retournés et ils m’ont vue… A ce moment, notre voisine du dessus a dégringolé l’escalier. Je l’ai attrapée, je l’ai poussée dans l’appartement et j’ai claqué la porte.

On entendait les hommes dehors. On a cherché désespérément à se cacher. Danny a aidé la voisine à grimper dans un petit espace aménagé dans le plafond de notre chambre à coucher, et je l’ai suivie avec Yael dans mes bras. Ensuite, Danny a attrapé Einat et fonçait vers la porte pour courir à l’abri souterrain quand les terroristes ont défoncé la porte.

[Certains] maintenaient Danny et Einat pendant que [d’autres] nous cherchaient... en tirant et en lançant des grenades. J’étais sûre que si Yael se mettait à crier, [ils] lanceraient une grenade dans notre cachette et que nous mourrions toutes. Alors, j’ai mis ma main sur sa bouche, en espérant qu’elle pourrait quand même respirer... Je me souvenais de ce que m’avait dit ma mère, comment elle s’était cachée des Nazis pendant [la guerre]…

Comme la police arrivait, les terroristes ont emmené Danny et Einat sur la plage. Des témoins m’ont dit que l’un d’entre eux avait tué Danny devant Einat… Puis il avait fracassé le crâne de ma petite fille sur un rocher avec la crosse de son arme… [C’était] Samir Kuntar.

Quand, plusieurs heures après, on est venu nous sortir de notre espace confiné, Yael aussi était morte. En essayant de sauver nos vies, je l’avais étouffée… »

**

Le lendemain, le cerveau de l’opération, Abu Abbas [aka Muhammad Zaydan, fondateur en 1977 du Front de Libération de la Palestine, organisation membre de l’OLP de Y. Arafat] déclarait depuis Beyrouth que l’attaque de Naharya avait été menée pour protester contre la signature, en 1978 à camp David, du traité de paix entre Israël et l’Egypte…

En 1985, le même Abu Abbas orchestrerait le détournement du Achille Lauro, bateau de croisière italien, au cours du duquel un retraité handicapé, américain et juif, Leon Klinghoffer, serait abattu et jeté à la mer dans son fauteuil roulant, dans le but d’obtenir la libération de Samir Kuntar…

- Arrêté par les Forces américaines le 15 avril 2003 en Irak où Saddam Hussein l’avait accueilli, Abu Abbas y est mort en prison, de « mort naturelle » selon le communiqué du Pentagone, le 8 mars 2004. Il repose au Cimetière des Martyrs, à Damas.

*

Le 16 juillet 2008, le Jerusalem Post rapporte que « le président [de l’Autorité Palestinienne] Mahmoud Abbas a adressé ce jour ses félicitations à la famille de Samir Kuntar et aux familles des autres prisonniers libanais devant être remis au Hezbollah… [Il] s’est félicité de l’échange de prisonniers (!) [entre Israël et le Hezbollah] et a congratulé la famille Kuntar… »

[Les corps [mutilés au point de rendre leur identification difficile] des 2 soldats isaréliens, Ehud Goldwasser and Eldad Regev, ont été restitués à Israël le 16 juillet 2008, dans le cadre de l’échange, précise une dépêche de l’AFP].

*

Le 17 juillet 2008, dans El Watan, T. H. revient longuement [et assez librement] sur l’affaire…

Extraits :

« Décidément, les héros ne meurent jamais. Un échange de prisonniers et de dépouilles, hier, entre Israël et le mouvement libanais Hezbollah en a donné la preuve, tout en rappelant certaines pages sombres de l’histoire du proche-orient.

Qui se souvient, en effet, de Kamel Adwane [l’un des dirigeants de l’OLP tués au cours de l’opération « Spring of Youth » menée au Liban à dans la nuit du 9 au 10 avril 1973], assassiné par Ehud Barak [qui avait participé à l’opération déguisé en femme], celui-là même qui allait devenir premier ministre israélien ? Ou de Dalal al Moghribi, celle qui allait justement venger cet assassinat en menant une héroïques [sic] opération à Tel-Aviv ? Dalal al Moghribi s’est tout simplement [!] emparé [re-sic] en 1978 d’un bus militaire [!!] israélien. Ou encore de Samir Kantar, certainement le plus ancien détenu du monde depuis la libération de Nelson Mandéla [!!!]…

L’enlèvement des deux Israéliens, le 12 juillet 2006 à la frontière libanaise, avait déclenché une offensive israélienne de 34 jours où 1200 personnes ont [sic] été tuées côté libanais, pour la plupart des civils, et 160 côté israélien, essentiellement des soldats. Le Premier ministre israélien, Ehud Olmert, avait laissé entendre que les deux soldats étaient morts mais le Hezbollah n’avait jamais donné d’information quant à leur sort….

Le responsable du Hezbollah chargé des dossiers des prisonniers, Wafik Safa, a indiqué à la chaîne du mouvement chiite, Al Manar, que parmi les 12 dépouilles [remises au Hezbollah par Israël] figurent celles de huit combattants du Hezbollah tués lors de la guerre avec Israël en juillet-août 2006. Selon lui, les quatre autres dépouilles sont celles de Dalal al-Moghrabi et trois de ses compagnons qui avaient mené en 1978, une opération spectaculaire en territoire israélien qui avait fait 36 morts…

Israël doit aussi libérer cinq Libanais qu’il détient, toujours dans le cadre de cet échange.

Parmi les Libanais qui doivent être libérés figure Samir Kantar, du Front de libération de Palestine (FLP), condamné en 1980 à cinq peines de prison à vie et 47 ans additionnels. En 1979, Kantar avait tué dans le nord d’Israël un policier [Eliahu Shahar], pris en otage un civil israélien qu’il avait abattu, puis tué [!] la fille de ce dernier. Les autres prisonniers sont Khodr Zaidane, Maher Kourani, Mohammad Sorour et Hussein Sleimane. Ils avaient été capturés lors de la guerre de l’été 2006.

Contrastant avec l’atmosphère sombre en Israël, la joie était visible au Liban. La journée d’hier a été décrété ‘‘journée fériée’’ par le gouvernement et le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, qui devait prononcer un discours.

‘‘Le Liban verse des larmes de joie, Israël verse des larmes de douleur’’, clame, triomphalement, une banderole géante déployée près de la frontière…

Le président palestinien, Mahmoud Abbas, s’est aussi félicité de l’opération d’échange de prisonniers et de dépouilles, a indiqué la présidence dans un communiqué : ‘‘Le président félicite la famille de Samir Kantar, le doyen des prisonniers arabes, et celles des autres détenus libérés’’.

Une page se tourne, mais rien n’est terminé. Les Palestiniens le savent trop bien… »

**

Le 18 juillet 2008, le Daily Star rapporte les propos de Samir Kuntar, au lendemain de sa libération.

Extraits :

« Quiconque pense que la libération des fermes de Shebaa [petite bande de terre de 22 km2 située à la frontière entre le Liban et le Holan, considérée comme territoire syrien par l’ONU] mettrait un terme à la résistance se trompe… Même si nous laissons les Israéliens tranquilles, eux, ils ne nous oublieront pas… regardez comment ils traitent ceux qui ont signé des traités avec eux [!]… Regardez ce qu’ils ont fait au… président Arafat… » - ici le Daily Star remarque : « [Samir Kontar] blâme, indirectement, Israël pour la mort du dirigeant palestinien en novembre 2004… »

Plus tôt dans la journée, à son arrivée dans sa ville natale, Samir Kuntar [l’orthographe de ce nom varie selon les sources] avait déclaré : « Pas un seul jour, je n’ai regretté ce que j’ai fait… Au contraire… Je reste dévoué à mes convictions [!] politiques [!!]… »

*

« Kontar a été reçu en héros dans sa ville natale », poursuit le Daily Star, qui précise que de nombreux habitants du village [Aabey, au sud-est de Beyrouth] et des environs sont venus au meeting pour le rencontrer. « Nous sommes très heureux en ce beau jour ; c’est une victoire [!] pour le Liban [!!] et pour la résistance nationale [!!!] », dit Yusra Khaddaj, 39 ans, qui se tient avec ses 3 petites filles sur la route qui conduit à Aabey » « Samir Kontar est le fils de tous les Libanais… »

*

Le 19 juillet 2008, nasr-moqawama.blogspot.com [« dédié à tous les peuples arabes en lutte pour leur Liberté »] rapporte d’autres propos tenus par Samir Kuntar à la télévision al-Manar, au lendemain de sa libération… « Je ne comprends pas cet état d’esprit chez les Arabes disant qu’ils sont solidaires de la Palestine, comme si la Palestine était une cause lointaine avec laquelle [sic] ils sont solidaires. Je comprends cela quand les Européens le disent, mais pour les Arabes, c’est leur propre cause. Il est de leur devoir de participer à la lutte pour libérer la Palestine… »

Et de commenter : « C’est tout cela que l’opération al-Radwane [« Al-Radwane, c’est le nom de guerre du dirigeant martyr du Hezbollah, Imad Mughnieh, assassiné au mois de février 2008, par les services de renseignements israéliens et d’autres »]. a libéré, cet état d’esprit, cet enthousiasme, ce sentiment de devoir envers la Palestine et les Palestiniens que les Arabes doivent avoir, tout ce que les voix serviles arabes ont voulu étouffer pendant ces longues années, prétendant que la libération de la Palestine est du devoir des seuls Palestiniens, justifiant leur propre défaite en regardant l’impuissance des Palestiniens à faire face, tous seuls, à l’alliance américano-européano-sioniste… »

*

Le 20 juillet 2008, Al Jazeera organise une fête pour l’anniversaire de Samir Kuntar [http://www.memritv.org/clip/en/1818.htm] …


***

Sources :

James Taranto, « Palestinian Courage », Wall Street Journal, 16 juillet 2008.

Paul Reynolds, « Middle East crisis : Future scenarios », BBC News, 27 juillet 2006.

James Taranto, « BB ‘C’ No Evil », Wall Street Journal, 27 juillet 2006.

Craig S. Smith, « Hero’s Welcome Expected in Lebanon for Captive of Israel », New York Times, 16 juillet 2008.

Smadar Haran Kaiser, « Prosecute Abu Abbas », www.aish.com, 25 mai 2003.

JPost.com Staff, « Abbas congratulates family of Samir Kuntar », Jerusalem Post, 16 juillet 2008.

T. H., « Hezbollah-Israël » El Watan, « le quotidien indépendant », 17 juillet 2008.

Hussein Abdallah and Maher Zeineddine, « Nation unites for heroes' homecomings, », Daily Star, 18 juillet 2008.

Cirepal – Centre d’Information sur la résistance en Palestine ,« Al-Radwane : l’opération qui a traîné Israël dans la boue », nasr-moqawama.blogspot.com [« dédié à tous les peuples arabes en lutte pour leur Liberté »], 19 juillet 2008.

Allahpundit, « Al Jazeera throws birthday party for freed Hezbollah child-killer », Hot Air, 23 juillet 2008.

« Al-Jazeera TV Throws a Birthday Party for Released Lebanese Terrorist Samir Al-Quntar », memritv.org, 19 juillet 2008.

Illustrations :

Agile, copyright Patrick Jelin.

Dame de cœur, copyright Dominique Fury.

Mer de Galilée, copyright Patrick Jelin.

??

mercredi 16 juillet 2008

Effets d’optique…


L’Autorité palestinienne a demandé à Israël de lui remettre les restes de Dalal Mughrabi, selon le Jerusalem Post (10 juillet 2008)…

*

Dalal Mughrabi (1959-1978), infirmière au Liban, était à la tête du commando du Fatah de Y. Arafat fort de 11 personnes (dont une autre femme) qui, après avoir débarqué sur une plage au nord de Tel-Aviv le 11 mars 1978, en provenance du Liban, a mené une série d’opérations en territoire israélien, connue sous le nom de « Massacre de la route côtière ».

Le commando avait abattu Gail Rubin, photographe « naturaliste » américaine, détourné un taxi, tué ses occupants, puis détourné un 1er bus, ayant à son bord des employés de la compagnie de transport Egged et leurs familles, un 2e bus, pareillement chargé, dans lequel il avait transféré les passagers du 1er, et continué son chemin en tirant sur les personnes et véhicules croisés, avec l’intention de jeter le bus chargé d’explosifs sur le parlement israélien. Pris en chasse par une unité de l’armée israélienne, le commando avait changé ses plans et pris la route d’Herzlya, avant d’être bloqué par un barrage à proximité de la ville.

Après avoir proclamé un « Etat palestinien indépendant », Dalal Mughrabi avait déclenché le feu. La fusillade allait durer 12 heures, après quoi Dalal Mughrabi ferait sauter le bus. Plusieurs passagers périrent dans les flammes, d’autres, qui tentaient de fuir, furent abattus par les membres du commando, qui, eux-mêmes, tombèrent sous les tirs israéliens. Dalal Mughrabi fut abattue par Ehud Barak, futur premier ministre. Au total, 37 civils perdirent la vie, dont plusieurs américains et une douzaine d’enfants, et plus de 70 furent blessés.

*

3 jours plus tard, sur ordre du premier ministre Menachem Begin, l’armée israélienne lançait une opération contre les bases de l’OLP au sud-Liban (Opération Litani).


*




Toujours selon le Jerusalem Post du 10 juillet 2008, Israël a accepté de remettre les restes de Dalal Mughrabi, ainsi que ceux de nombreux Palestiniens et Libanais, au Hezbollah, dans le cadre d’un nouvel échange de « prisonniers ».

En formulant sa requête, l’Autorité palestinienne [qui a donné le nom de lDalal Mughrabi à plusieurs écoles de filles et camps de vacances] a dit vouloir l’« honorer » en organisant ses funérailles en grande pompe à Ramallah.

M. Azzam al-Ahmed, membre important du Fatah, très lié au président de l’Autorité palestinienne, M. Mahmoud Abbas, et vice-Premier ministre du gouvernement d'union nationale (le Premier ministre étant Ismaïl Haniyeh, du Hamas) depuis 2007, a dit de D. Mughrabi, dont la famille est originaire de Jaffa, qu’elle est « la première palestinienne à avoir mené une opération en Israël, et des plus courageuses »… Dans son testament... D. Mughrabi, qui était membre du Fatah, aurait demandé à sa famille de faire en sorte qu’elle puisse être enterrée en ‘‘ Palestine ’’…

Nous voulons faire de ses funérailles une noce (!) nationale, une célébration majeure… L’opération qu’elle a menée au large de Jaffa, sa ville natale, était héroïque et exemplaire. On se souviendra toujours d’elle comme d’un symbole de la lutte des femmes palestiniennes ».

**



Sous le titre « Plus qu’une bataille sémantique », T. H. revient dans El-Watan, le 14 juillet 2008, sur la rencontre entre dirigeants israéliens et palestiniens dans le cadre de la conférence d’ouverture de l’Union pour la Méditerranée proposée par le président français, M. Sarkozy.

Extraits :

« Entre Palestiniens et Israéliens il y a toujours un mais, ou encore le mot en moins, mais les derniers sont passés maîtres dans les coups médiatiques.

Ainsi, il en est de leur premier ministre qui déclarait dimanche dernier à Paris, que Palestiniens et Israéliens n’ont jamais été aussi proches d’un accord. Un concept bien vaste, finit-on par se rendre compte, depuis que l’accord d’Oslo a été signé puis tué (!) quelques années plus tard par Israël (!!).

[Le] sommet de l’UPM… s’est conclu par l’adoption d’une déclaration finale d’une dizaine de pages, mais, a déclaré le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, ''un dernier moment de blocage entre les Israéliens et Palestiniens a fait que le texte doit être encore un peu corrigé… Au dernier moment, nous avons échoué, peut-être à une demi-heure près sur un mot… [qui] concerne ‘l’Etat nation, l’Etat national et démocratique’… ‘National, ça sous-entend toute une difficulté de retour des réfugiés et d’Etat juif ou pas juif, Etat palestinien. Bref, ça n’a pas eu lieu’ ''.

La délégation palestinienne a confirmé ce différend. ‘‘Les Israéliens ont insisté pour inclure la mention ‘Etat pour le peuple juif’, ce à quoi nous nous sommes catégoriquement opposés ’’, a déclaré le ministre palestinien des Affaires étrangères Riyad Al Maliki. ‘‘Il était hors de question pour nous de l’accepter’’… ‘‘Nous aurions souhaité que la déclaration finale sur ce point soit plus claire’’, a renchéri (!) un responsable palestinien parlant sous couvert de l’anonymat (!!). Dans la déclaration publiée à l’issue de la conférence euro-méditerranéenne de Lisbonne, les 5 et 6 novembre derniers, il est écrit que ‘‘ les discussions bilatérales entre Israël et l’Autorité palestinienne doivent préparer le terrain (...) pour deux Etats nationaux ’’. Le 27 novembre dernier, à Annapolis, en revanche, il n’est fait mention que de ‘‘ l’objectif de parvenir à deux Etats, Israël et la Palestine ’’.

Ce n’est pas une simple bataille sémantique… Ses enjeux sont énormes. Ils renvoient à la notion d’Etat avec sa continuité géographique et politique, ses frontières telles que reconnues par les instances internationales et en aucun cas comme celles qu’Israël entend définir de manière unilatérale. C’est la souveraineté palestinienne sur l’ensemble (!) de son territoire ainsi que ses ressources, dont l’eau devenue un motif de guerre (!!), le droit de disposer d’une force militaire (!!!), et surtout dans ce lot d’interrogations et de revendications, le droit des réfugiés palestiniens au retour (!!!!)…

Cela tient peut-être à quelques mots, il est vrai, mais leur signification est déterminante pour le futur Etat palestinien »…

***

Sources :

James Taranto, « A Moderate massacre », Wall Street Journal, 14 juillet 2008.
Khaled Abu Toameh, « PA wants 'festive' funeral for coastal road killer », Jerusalem Post, 10 juillet 2008.
« A Sabbath of Terror », Time, 20 mars 1978.
Dalal Mughrabi, wikipedia.
T. H., « Plus qu’une bataille sémantique », El Watan, « le quotidien indépendant », 14 juillet 2008.

Illustrations :

Bronze, copyright Alain Rothstein.
Colonne brisée, copyright Patrick Jelin.
Les marches de Socrate, copyright Patrick Jelin.

samedi 12 juillet 2008

Réchauffement climatique…



En juillet 1922, George N. Ifft, consul des Etats-Unis à Bergen (Norvège) envoie un rapport au Département du commerce américain.


Extraits :

« L’océan arctique est en plein réchauffement ; les icebergs deviennent plus rares et dans certains endroits les phoques trouvent l’eau trop chaude… [Divers] témoignages, de pêcheurs, de chasseurs de phoques et d’explorateurs… pointent tous vers un changement radical des conditions climatiques et des températures tel qu’on n’en a jamais connu dans la zone arctique…
D’après plusieurs missions d’exploration, on ne trouve pratiquement plus de glaces au-delà [d’une latitude] de 81 degrés 29 minutes. Des sondages à 3100 mètres révèlent qu’à cette profondeur, le Gulf Stream est toujours chaud. De grandes masses de glace ont été remplacées par des moraines de terre et de rochers… et dans certains endroits bien connus, des glaciers ont entièrement disparu. On ne trouve presque plus de phoques ou de poissons blancs au sud de l’Arctique, et dans les anciennes zones de pêche des phoques, on rencontre de larges bancs de harengs… qui ne s’étaient jamais aventurés si loin… »

*

Source :
John H. Hinderaker, « Global Warming, Recycled », Power line, 11 juillet 2008.
Illustration :
Mystère Morgat, copyright Alain Zimeray.

dimanche 6 juillet 2008

Récits, pailles, poutres, etc.




Le 2 juillet 2008, Al-Jazeera diffuse l’information suivante sur son site : « Un palestinien [!] a tué au moins 3 personnes et blessés une trentaine d’autres en jetant son bulldozer de 20 tonnes sur un bus bondé et sur des voitures, dont l’une a été entièrement détruite, dans Jaffa Road (Jérusalem-ouest) avant d’être abattu par 2 policiers et un agent de sécurité…
Mickey Rosenfeld, porte-parole de la police israélienne a décrit l’incident [!!] ainsi : [Il s’agit d’]un attentat ‘terroriste’ commis par un homme de 30 ans, résidant à Jérusalem-est occupée. »


**


Dans la journée, une correspondante anonyme fait part de sa réaction au MPAC (Muslim Public Affairs Committee) du Royaume-Uni, qui la met en ligne sur son site.

Extraits :

« Je ne suis pas vraiment surprise quand je vois des reportages biaisés sur Fox, Sky ou même la BBC, mais je ne suis pas revenue de ce que j’ai vu sur Al Jazeera English cet après-midi.
Depuis son lancement, Al Jazeera English est devenue sans difficulté ma source d’information préférée – un champion (« crusader ») de la vérité dans la masse fangeuse des médias sous influence sioniste.
… Aujourd’hui, la bulle a éclaté. J’ai été a abasourdie par le manque flagrant d’équilibre dans le ‘‘flash’’ de 17 heures à propos de l’attentat palestinien au bulldozer à Jérusalem-ouest…
Pas d’interviews en direct avec des représentants palestiniens.
Il faut voir le reportage pour comprendre pleinement [!] mes sentiments [!!]. J’étais vraiment triste de cette perte inutile de vies humaines – 3 civils israéliens tués, des douzaines d’autres blessés… La suite du reportage m’a choquée par son parti-pris pro-Israël : il y avait même une interview avec un représentant du Jerusalem Post.
Il n’a été donné à aucun représentant palestinien la possibilité de nier les accusations de ‘terrorisme’ palestinien ; pas de référence non plus dans ce reportage aux centaines de palestiniens qui ont été tués depuis le début de l’année, pour donner le contexte. Et y a-t-il même un décompte officiel des morts palestiniennes ou bien ne sont-elles que ‘dommages collatéraux’ ? Pour seule présence palestinienne dans ce ‘‘flash’’, un communiqué du Hamas… déclarant que l’attaque ‘est la conséquence naturelle de l’agression israélienne permanente et des crimes contre notre peuple en Cisjordanie et dans Jérusalem occupée’.
Ainsi, les sionistes ont le droit de donner des interviews et de continuer leur propagande en faisant passer cet attentat pour le genre de choses qui se passent quotidiennement, et les Palestiniens, qui sont occupés et sont l’objet d’attaques quotidiennes de la part des Israéliens, n’ont pas celui d’avoir leur position mise sur le même pied…
Peu de changement dans les ‘‘flashes’’ suivants.
Après les avoir vus, je n’ai pas changé d’avis : alors que le représentant du Jerusalem Post est autorisé à se servir de cette tragédie pour susciter la pitié des spectateurs à propos d’autres attentats commis cette année, sans rapport avec celui-ci, Al-Jazeera ne met pas en balance le nombre croissant de palestiniens qui ont été tués pendant la même période – plusieurs centaines.
Même la BBC s’est rachetée [!] à cette occasion, en rappelant dans son ‘‘flash’’ de 18 heures le nombre de palestiniens et d’israéliens tués cette année, 29 Israéliens et 400 Palestiniens, ce qui met à peu près en contexte le communiqué du Hamas… »


**





Le 3 juillet 2008, T. H. rapporte, en la commentant, la même information que celle diffusée par Al-Jazeera la veille, dans El Watan, « le quotidien indépendant », sous le titre : « Attaque palestinienne à El Qods ».

Extraits :

« Conséquence de la désillusion des Palestiniens, née du blocage du processus de paix par Israël, ou plus simplement poursuite des actions de la résistance palestinienne contre l’occupant israélien, la scène [!] proche-orientale a enregistré, hier, l’apparition d’un nouveau mouvement par la force des armes [!!] et en plein centre de la ville sainte d’El Qods [!!!], puisqu’il en est à sa deuxième opération depuis le mois de mars dernier.
Il s’agit des Brigades des hommes libres de la Galilée. En effet, un Palestinien [!] au volant d’une pelleteuse a tué hier au moins trois Israéliens et blessé plus de 45 autres dans le centre de cette ville sainte ravagée par le processus de colonisation. Selon la police, l’auteur de cette opération était un homme âgé de 30 ans, habitant du village de Sour Baher [!!], marié et père de deux enfants. L’attentat s’est produit à midi précise dans l’une des rues les plus passantes de la ville, sur le chantier du tramway actuellement en construction, provoquant un mouvement de panique. Un tramway très controversé [!!!] avec des implications internationales [!!!!]…
Un groupe palestinien peu connu, ‘‘Les Brigades des hommes libres de la Galilée’’, a affirmé, hier, être responsable de l’attaque. Ce groupe avait également revendiqué l’attentat meurtrier contre une école talmudique le 6 mars à El Qods [!]… Huit étudiants israéliens d’un institut d’études talmudiques d’El Qods ouest [!!] avaient été tués par balles par un Palestinien qui a été abattu peu après…
L’attaque d’hier intervient alors que le mouvement islamiste Hamas et Israël ont signé une trêve des violences dans la bande de Ghaza. Le mouvement islamiste qui contrôle la bande de Ghaza a qualifié cette attaque de ‘‘réponse naturelle aux agressions israéliennes’’, mais a indiqué n’avoir aucune information sur ses auteurs… »

**

Le 3 juillet 2008, à propos du même « incident », on peut lire ceci dans Ha’aretz :
« Le terroriste responsable de l’attentat à Jérusalem [hier]… Hussam Tayisir Duwiyat, 30 ans, habitant le village de Sur Baher, au sud-est de Jérusalem, était marié et père de 2 enfants, âgés de 5 et 4 ans…
Il a été abattu par les forces de sécurité après qu’il eut volé un bulldozer sur le chantier où il travaillait et l’eut lancé sur un bus et plusieurs voitures dans Jaffa Street, au centre de Jérusalem. 3 personnes ont été tuées, des dizaines d’autres, blessées.
L’avocat de la famille a déclaré que Duwiyat n’était pas un terroriste, et que l’attentat ne pouvait donc pas être qualifié de ‘terroriste’’ : ‘‘un groupe qui revendiquerait la responsabilité [de cet acte] le ferait, en la circonstance, uniquement pour gagner en notoriété…
C’est un événement tragique. La famille et moi-même présentons nos condoléances aux familles endeuillées et souhaitons un prompt rétablissement aux blessés’’, a ajouté Shimon Kokush. ‘‘C’était un homme jeune qui avait fait de la prison pour viol… et un drogué’’.
L’avocat a indiqué qu’il essayait de laver la famille de tout soupçon et d’empêcher la destruction de sa maison, ce que le premier ministre, M. Ehud Olmert, a décidé d’ordonner.
‘‘Et il n’y a aucune raison pour que [la famille] ne touche pas la prime d’assurance, à moins que les Arabes israéliens ne fassent l’objet de discrimination…’’
Un représentant de la famille a… accepté qu’une autopsie soit pratiquée pour démontrer que Duwiyat était sous l’influence de la drogue quand il a pris le volant de son bulldozer…
Kokush, avocat à Tibériade, a précisé qu’il représentait la famille parce que ‘‘chaque citoyen a droit à une représentation légale. C’est une famille de citoyens, avec les mêmes droits que les autres, et une telle représentation est d’autant plus impérative qu’il est question d’acte terroriste’’…
La famille a évité tout contact avec les représentants de la Presse.
Après le départ des forces de sécurité… une des tantes [de Duwiyat] est montée sur un toit, a ululé et crié le nom du terroriste en l’appelant ‘shahid’ (martyr)… »

**



Le même jour, peu après l'anniversaire de la mort de Mohamed Boudiaf (1919-1992), assassiné quelques mois sa nomination à la présidence de l’Etat algérien par un sous-lieutenant du Groupe d'Intervention Spécial, Ali Bahamane signe un éditorial nostalgique, vengeur et plein de « double-entendre » (comme disent les Amerlauds), dans El Watan, sous le titre : « Le voile honteux ».

Extraits :

« Sans cesse, il faut parler d’histoire à nos enfants, sans arrêt leur dire que l’Algérie est née dans le sang et les larmes et que la liberté [!] d’aujourd’hui a été arrachée par le sacrifice et le martyre. C’est la connaissance de ce passé qui irriguera leur mémoire et les aidera à se forger une conscience patriotique [!!]. Toutefois, celle-ci ne saurait être saine et complète si elle occulte l’autre histoire, celle-là beaucoup plus proche, celle qui a trait à la lutte conte l’intégrisme armé : les années 1990 furent marquées par une guerre totale livrée contre la population, comme le fut la décennie 50 qui a vu les troupes coloniales françaises s’acharner contre les Algériens révoltés.
La dissolution du FIS fut le point de départ d’une aventure insurrectionnelle savamment coordonnée par une poignée de politiciens islamistes ivres de pouvoir visant à faire changer de visage à l’Algérie, lui ôter son caractère républicain [!] au profit d’une autocratie moyenâgeuse. Le projet visait à dénier son algérianité à l’Algérie comme s’y est attelée la politique du colonialisme français. Des milliers de fanatisés furent entraînés dans cette expédition qu’ils menèrent avec une incroyable sauvagerie, n’épargnant aucune couche de la population, ne se souciant ni de l’âge ni du sexe de leurs victimes.
Ce fut le temps des égorgeurs et des destructeurs. Il a fallu un mouvement de résistance populaire des plus remarquables [!], digne de celui de Novembre 54 [!!] pour stopper la barbarie intégriste. Le prix le plus fort fut payé en victimes et en traumatismes, l’Algérie en sortit presque indemne. Mais aujourd’hui, de cette terrible parenthèse, peu de choses se disent, comme si un voile honteux devait la couvrir. Les commémorations des événements importants et les cérémonies de recueillement à la mémoire des victimes du terrorisme se raréfient d’année en année. Lorsqu’elles existent, elles n’attirent pas foule.
Peu de gens, surtout les jeunes, savent qui est Boudiaf, qu’il est revenu d’exil en Algérie pour répondre une nouvelle fois au devoir et qu’il a fini par tomber en martyr, criblé de balles assassines…
L’Etat ne célèbre aucune mémoire et rares sont les institutions, les lieux ou les endroits qui portent des noms de victimes du terrorisme… Le pouvoir politique a couvert la décennie 1990 du voile [!] de la Réconciliation nationale faisant fi de son apport historique à l’Algérie combattante, républicaine, patriotique et démocratique [!!]… »


***

Sources :

« Deaths in Israel bulldozer attack », english.aljazeera.net, 2 juillet 2008.
mpacuk.org, 2 juillet 2008.
T. H., « Attaque palestinienne à El Qods », El Watan, « le quotidien indépendant », 3 juillet 2008.
Ali Bahmane, « Le voile honteux », El Watan, « le quotidien indépendant », 3 juillet 2008.
Jonathan Lis, Avi Issacharoff et Eli Ashkenazi, « Jerusalem terrorist's family told to take down mourners' tent », Ha’aretz, 3 juillet 2008.

Illustrations :

To the Wall, copyright Alain Bellaïche.
La mouche, copyright Patrick Jelin.
Colosse de Memnon, copyright Patrick Jelin.

mercredi 2 juillet 2008

Re-Tare congénitale




Quand, en 393, Théodose Ier, empereur d’Orient et d’Occident qui a beaucoup à se faire pardonner par l’Eglise (notamment le massacre, en 390, de 15 000 habitants de Thessalonique, qui, enflammés par une banale affaire de mœurs, avaient mis en pièces le gouverneur de la ville), cédant à la pression du puissant évêque de Milan, Ambroise, père de l’Eglise, grand pourfendeur de l’arianisme et du paganisme, pionnier en matière de liturgie, fameux pour avoir converti St Augustin, décide d’abolir les très païens Jeux Olympiques, il y a bien longtemps que ceux-ci ne sont plus que l’ombre d’eux-mêmes.
Autrefois marqués par le sacré, ces jeux mimant la guerre et consacrés à Zeus, au cours desquels s’affrontaient les champions (hommes libres et parlant grec) de villes pleines d’animosité les unes envers les autres, ont d’abord été concurrencés, par les Jeux d’Athènes et de Delphes notamment, puis, avec la domination romaine (à partir de - 230), sont progressivement devenus l’affaire d’athlètes « professionnels ». Mais, dès avant cela…
« A partir de l’été - 332, l’affaire d’un athlète athénien du nom de Kallipos mobilisa l’attention [des citoyens d’Athènes] », nous apprend Christian Habicht (in Athènes Hellénistique). « [Kallipos] avait remporté l’épreuve du pentathlon à Olympie mais, par la suite, avait été accusé d’avoir soudoyé ses concurrents ; cela lui valut, à lui comme à eux, une amende de la part des juges du concours. Or, de même qu’une couronne olympique était synonyme de gloire pour la patrie du vainqueur, de même, ici, la souillure de la faute imputée à Kallipos retombait sur la cité tout entière…
… « Les citoyens athéniens, convaincus que Kallipos était victime d’une cabale [!], choisirent Hypéride [grand orateur, homme d’Etat athénien, élève de Platon et d’Isocrate] pour défendre sa cause », sans grand effet... « Athènes refusa de verser l’amende… et les citoyens athéniens se virent interdire la participation aux concours à venir. Ce n’est que lorsque les autorités delphiques firent savoir aux Athéniens que la Pythie ne leur rendrait plus d’oracle tant qu’ils ne se seraient pas acquittés de leur dette qu’ils cédèrent enfin. Avec l’argent de la peine – comme cela avait déjà été le cas en - 388 après une affaire de fraude comparable – on dressa dans le sanctuaire d’Olympie six effigies de Zeus en bronze… assorties d’inscriptions exhortant les athlètes à la droiture [!!]… »

**



Un hasard sur-déterminé [!] va, 13 siècles après, ramener Olympie et ses Jeux sur le devant de la scène.
*

Retrouvé en 1766 par l’antiquisant anglais Richard Chandler, le site va être l’objet de recherches méthodiques à partir de 1829, menées par les savants français ayant participé à l’Expédition de Morée – du nom du château gardant l’entrée du golfe de Corinthe…

*

Retour en arrière.
Le 24 avril 1827, dimanche des Rameaux, la ville grecque de Missolonghi, porte du Golfe de Corinthe, financée et armée par Lord Byron (il y est mort de maladie en 1824), plusieurs fois assiégée depuis le début de la guerre d’indépendance contre les Ottomans (1821), est enfin prise par les Turcs (et leurs alliés égyptiens) : des habitants se font exploser avec leurs poudrières ; les survivants sont massacrés ou vendus comme esclaves ; les Turcs placent 3 000 têtes tranchées sur les remparts…
*

A la suite de quoi, France catholique, Royaume-Uni anglican et Russie orthodoxe, improbables alliés, décident d’intervenir aux côtés de la Grèce….
La France envoie ses troupes dans le Péloponnèse ; une Mission scientifique de Morée les accompagne. Les savants réalisent des cartes, font des relevés, des coupes, des plans, tous considérés comme remarquables ; ils font aussi des propositions de restauration de monuments.
Les savants passent plusieurs semaines à Olympie, quadrillent le site, pratiquent des sondages en ligne et parviennent à déterminer l’emplacement du temple de Zeus. Trait caractéristique : les savants se refusent à emporter des fragments des pièces retrouvées…

*

En 1846, est créée l’Ecole française d’Athènes pour poursuivre de façon systématique le travail entamé par L’Expédition scientifique de Morée.

*

En 1875, l’Allemagne, qu’une rivalité remontant à l’après-Charlemagne au moins, et devenue hostilité armée depuis 1870, oppose à la France, contre-attaque...

*

Chaude lutte sur le « front idéologique », dans les termes choisis du regretté président Mao. Face à La France, deux fois héritière de Rome (le latin, l’Eglise catholique, l’empereur), l’Allemagne protestante, souffrant d’avoir longtemps été politiquement inexistante, se cherche fiévreusement une « identité » depuis au moins Leibniz (1646-1716) – qui a fondé l’Académie de Berlin (1700) pour contribuer sinon à lui en donner une au moins pour lui assurer un début de consistance et « visibilité ».
La case « Rome » étant occupée, la case « Athènes » était un « choix » évident : antériorité, autorité culturelle, virilité, amour de l’agôn (assemblée, puis le concours, en particulier sportif ; Agôn personnifié - cf. Pausanias, Description de la Grèce, V, XXVI, 3 - avait sa statue à Olympie, tenant des haltères…), vertu, etc.
L’Allemagne pensante (Herder, Hegel, Fichte, Schelling, D. Strauss, Marx, Jaeger, Heidegger, par exemple), mais aussi politico-délirante (l’auteur de Mein Kampf) se battrait pendant plusieurs décennies pour s’approprier la Grèce. – Remarque : choisir « Athènes » contre « Rome » ne pouvait manquer de faire apparaître, très vite, « Jérusalem » comme enjeu…

*

L’architecte et historien Ernst Curtius, frère du philologue Georg Curtius, envoyé spécial de l’empereur Frédéric III (dont il a été le précepteur), obtient des autorités grecques (la dynastie régnante est d’origine bavaroise), au terme d’une longue négociation, que l’accès aux sites archéologiques soit réservé à l’Institut archéologique allemand d’Athènes (sécession, en 1871, de la section « Allemagne » de L’Institut de correspondance archéologique, créé à Rome en 1829 pour rassembler tous les spécialistes de la Rome antique).
Conséquemment, à partir de 1875 l’Institut, sous la direction de Curtius et financé directement par l’empereur, va procéder à l’excavation du site de l’Olympie antique, mettre au jour plusieurs bâtiments, notamment le temple de Zeus et celui d’Héra, et découvrir nombre de sculptures et de bronzes (plus de 14 000 pièces répertoriées), visibles dans un musée construit sur place par ses soins.

*


Des excavations, d’ambition plus modeste, sont menées en 1908 et 1929 mais reprennent sur une grande échelle, en 1936, à la veille des Jeux Olympiques d’été qui vont se tenir à Berlin…

**



Quant à Pierre de Coubertin, qui ne pouvait pas ne pas participer de ce complexe politico-culturel lourdement chargé, lui qui avait été élevé dans une famille de notables marqués par la défaite de 1870 et la perte de l’Alsace-Lorraine, lui qui avait un temps considéré le métier des armes, une idée bien précise – et bien étroite – de ce qui avait précipité la défaite des Français en 1870 semble avoir motivé son désir, avant même de penser aux Jeux olympiques, de faire du sport d’abord un outil pédagogique puis un outil de reconstruction nationale.
Dans Pédagogie sportive, ouvrage publié en 1919, Coubertin cite « La crise évitable », un de ses articles, écrit en 1911, preuve que la Grande Guerre ne l’a pas fait changer d’avis :
« Le plus grand service que le sport puisse rendre à la jeunesse, c’est d’empêcher chez elle le vagabondage de l’imagination et de la maintenir non dans l’ignorance mais dans l’indifférence à l’égard de ce qui menace d’éveiller en elle un sensualisme prématuré [!]. On fait intervenir à tort ici des considérations climatologiques ou ethniques dont l’influence est minime. La nature a disposé sagement que l’éveil des sens, chez l’éphèbe [!!], serait tardif mais la nature est contrariée de trois manières sur ce point par la civilisation, laquelle tend d’abord à imposer à l’éphèbe une existence trop sédentaire, ensuite lui inflige le redoutable contact d’une littérature imprégnée d’érotisme [!!!] et enfin ne lui fournit pas le moyen de satisfaire son désir normal d’affirmer sa virilité prochaine en imitant l’adulte qu’il est pressé de rejoindre… »


**


C’est à un « patriote » comme lui, Dominicain non-conformiste, docteur en théologie, lecteur de Kant et de Hegel, ancien aumônier militaire, ancien sportif convaincu des vertus morales et pédagogiques du sport, ancien lauréat des « Jeux Olympiques du Rondeau » (organisés depuis 1832 par le petit Séminaire catholique du Rondeau à Grenoble), l’abbé Henri Louis Didon (1840-1900), directeur de l’Ecole Albert-le-Grand à Arcueil, que Coubertin emprunte – les deux hommes se connaissent depuis 1891 – la devise de « ses » Jeux Olympiques : « Citius, altius, fortius » (Plus vite, plus haut, plus fort), qui apparaît dans le 1er numéro de juillet 1894 du Bulletin du CIO.






***



Sources :

linternaute.com
agora.qc.ca/mot.nsf
Christian Habicht, Athènes Hellénistique (1995), Paris, Les Belles Lettres, 2006, pp. 38-39.
Olympia, wikipedia
Expédition de Morée, wikipedia
Abel Blouet et Amable Ravoisié, Expédition scientifique de Morée, ordonnée par le Gouvernement Français. Architecture, Sculptures, Inscriptions et Vues du Péloponèse, des Cyclades et de l’Attique, Firmin Didot, 1831.
ecole-francaise.it
Encyclopaedia Universalis.
Aurelio Berardi, Coubertin lecteur de Flaubert, sportetlettres.net
Alain Arvin-Bérod, « En France l’idée des Jeux Olympiques a traversé les siècles », Revue Olympique, 1994, la84foundation.org

Illustrations :

Déployé…. copyright Patrick Jelin
Isadora Duncan ? copyright Alain Bellaïche
Equilibre, copyright Patrick Jelin