lundi 25 février 2008

Ecce Homo...




A chaque élection décisive, par exemple présidentielle, se rejoue une vieille bataille, celle qui a opposé les philosophes et les sophistes dans l’Athènes de Platon : argumentation versus séduction, ordre des raisons versus ordre des sentiments. L’époque étant ce qu’elle est ( !), les « philosophes » d’aujourd’hui sont politologues, économistes, animateurs de groupe de réflexion et autres gens sérieux-et-responsables, abordant la politique au travers de l’analyse quantitative - comme un directeur des achats ; les « sophistes » eux, sont des communicateurs – et ils n’ont pas bonne image.
Aux chiffrages controversés des programmes répondent donc choix de cravate, tailleur ou coupe de cheveux, gravement examinés et évalués, comme si une argumentation technique pouvait commander absolument le choix de l’électeur, comme si une tenue pastel ou des incisives limées pouvait jamais empêcher Napoléon (Napoléone ?) de percer visiblement sous Bonaparte…
Il y a de l’affect dans la politique, et pas seulement des intérêts calculables, il y a accomplissement de désir et pas seulement jugement synthétique – du genre de celui qui s’exerce lorsqu’il s’agit de déterminer l’équipement électro-ménager le plus approprié à ses moyens et à l’espace dont on dispose. – Et encore, même là, le « goût » intervient.
C’est parce qu’il y a de l’affect en quantité qu’il y a enthousiasme, passion et aveuglement. Un président, prenant au sérieux la « filiation » dont l’a doté son vichyssois de père en « relevant » un nom, au point de vouloir se faire admettre dans la société des descendants de pionniers américains dont était membre le porteur du nom éteint. Des jeunes gens, sous la pluie, un soir de mai 1981, demandant « du soleil » à l’homme de la Cagoule, l’ami de Bousquet, élu contre le précédent. Jacques Chirac traité de « fasciste », pendant 30 ans, par une gauche vertueuse ne parvenant pas à reconnaître qu’il faisait partie de la famille radicale-socialiste. Ou bien encore George W. Bush, régulièrement comparé à Hitler par la gauche éclairée de Hollywood et de la Ivy League, qui, comme il faut bien des « camps » pour justifier sa comparaison, désigne à l’attention ceux dans lesquels sont internés des terroristes - capturés dans des zones de combat…
Il n’y pas que l’affect mais aussi le dispositif général dans lequel il circule -le « psychisme » si on veut -, qui dépend, comme le soupçonnent, chacun à sa façon, Castoriadis, Deleuze, Lefort, Lyotard et Marin, a à voir avec les récits dans lesquels les peuples fondent leur « identité », leur « Histoire » si on veut, avec le type de mise en ordre du pulsionnel qu’ils se sont choisi, la façon dont ils transforment, en la narrant, la différence sexuelle sans figure en opposition représentable-dicible : Lumières, Emancipation, Réaction, Progressisme, ancêtres gaulois, aryens-sémites, colonisateur-colonisé, etc.
Sans oublier le traitement de la Présence réelle chez les christianisés : chez les catholiques, le pape est en principe le maître du Symbolique, et le roi, celui du Politique. La question de la représentation légitime peut donc se poser, souvent violemment, pas celle de l’incarnation – sauf en France, gallicanisme et Louis XIV obligeant, où le roi a un corps double ; chez les réformés de toutes persuasions, tout un chacun - chanteur, prédicateur, pèlerin en proie au syndrome de Jérusalem, auteur de science-fiction ou homme politique - peut prétendre à être maître du Symbolique, la place étant vacante, la question de l’incarnation ne cesse de se poser. – Le cas, complexe, des orthodoxes ne nous intéresse pas ici.
La campagne présidentielle bat présentement son plein aux USA, il est difficile de ne pas le savoir, et le sénateur de l’Illinois, M. Barak Hussein Obama a de fortes chances de l’emporter : il est beau, il est jeune, il est authentiquement africain-américain (caractérisation qui lui a longtemps été déniée par ceux des américains qui se la sont appropriée), il est jeune, il est beau, il a reçu l’onction du clan Kennedy, ce qui n’est pas rien dans un pays qui souffre encore d’avoir été privé d’un président jeune et beau, et il est plus « présentable » que le président assassiné à Dallas par un agent du KGB, au lendemain de la crise des missiles de Cuba : il a certes, lui aussi, des amis compromettants (un pasteur antisémite, des animateurs de « charités » islamistes) mais ce n’est pas un homme à femmes. Sinon, les partisans de Mme Hillary Rodham Clinton se seraient arrangés pour le faire savoir.

Quel rapport avec l’incarnation ?
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Diagnostic

L’une des éditorialistes du Wall Street Journal, Peggy Noonan, qui ne doit pas être de ses partisans, écrit ceci à propos du sénateur de l’Illinois :
« La grande force de Barack Obama n’est pas son éloquence. Quand vous regardez M. Obama faire un discours, vous vous penchez en avant et pensez : C’est bon. Il est engageant. J’aime sa façon de parler. Et après ça, tous les commentateurs disent de lui qu’il est “incroyablement éloquent’’… Mais en fait, quand vous allez sur Internet, trouvez une transcription du discours et l’imprimez pour la lire, c’est-à-dire quand vous retranchez M. Obama et laissez ses mots parler d’eux-mêmes, vous vous rendez compte que le discours n’était pas spécialement intéressant…
M. Obama est magnétique, interagit avec le public, martèle un refrain : ‘‘Yes, we can’’. C’est bon, et comparé à Hillary Clinton et à John McCain, qui ne semblent, ni l’un ni l’autre, vraiment aimer faire des discours, ça paraît meilleur que ça n’est. Mais est-ce de l’éloquence ? Non. L’éloquence, c’est une pensée profonde exprimée avec des mots précis. Chez M. Obama la partie “pensée profonde” est manquante. Ce qui est présent, ce sont les sentiments. »

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Symptôme

Dans le Washington Times, Jennifer Harper écrit :
« La nation va peut-être voir arriver quelques bébés prénommés ‘‘Barack’’, ces prochains mois, quel que soit le vainqueur de l’élection présidentielle…
Barack a été couronné « Prénom de l’année » par Laura Wattenberg, créatrice du Baby Name Wizard, un site « chercheur de tendances » populaire chez les futurs parents (IVillage.com), qui offre des avis circonstanciés à ceux qui entrent dans la compétition des prénoms de bébé.
‘‘Ce n’est pas une prise de position politique, juste une prise de position sur les prénoms dans notre culture. Le sénateur Barack Hussein Obama conduit les prénoms politiques américains vers des terres inexplorées… Il a déjà créé un précédent, en faisant d’un prénom un thème de campagne…’’
Barack n’apparaît pas encore sur les listes de la sécurité Sociale, qui se fonde sur les certificats de naissance pour mesurer la popularité des prénoms des garçons et des filles… »


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Re-Symptôme

Selon The Swamp, blog politique du groupe Tribune, « le jour précédant un débat au Texas, le sénateur Barack Obama a attrapé froid. [Le lendemain], au bout d’une demie-heure de discours, le Démocrate de l’Illinois a annoncé qu’il devait faire une courte pause : ‘‘Je dois me moucher. J’en ai pour une seconde.’’…
Il sort un Kleenex... et s’essuie le nez.
La quasi totalité des présents, estimés à 17 000, selon les membres de son équipe de campagne, éclate en applaudissements. »

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Contre-symptôme

La thèse écrite par la future Mme Obama en 1985, « Princeton-Educated Blacks and the Black Community », a été retirée de la Bibliothèque de Princeton, et ne sera pas accessible avant l’élection présidentielle de novembre prochain.
Extrait : « [La voie que j’ai choisie en m’inscrivant à Princeton va, selon toute vraisemblance] me conduire à m’intégrer et/ou à m’assimiler encore plus dans une structure culturelle et sociale blanche qui ne me permettra que de rester en périphérie de la société et jamais de devenir une participante à part entière. »
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Sources :
Peggy Noonan, « Try a Little Tenderness », Wall Street Journal, 22 février 2008.
Jennifer Harper, « Barack inspires change in baby names », The Washington Times, 21 février 2008.
James Taranto, « Obama Blows it », Wall Street Journal, 21 février 2008.
Jeffrey Ressner, « Michelle Obama thesis was on racial divide », Politico.com, 22 février 2008.
Illustrations : 1, copyright François Bensimon ; 2, copyright Dominique Fury.

lundi 18 février 2008

Res ipsa loquitur







Cecily Cardew : Etes-vous en train de suggérer, Miss Fairfax, que j’ai manipulé Ernest pour qu’il me propose le mariage ? Comment osez-vous ? Le temps du masque inconsistant des bonnes manières est passé. Quand je vois une pelle je l’appelle une pelle.
Gwendolen Fairfax. [Sarcastique] Je suis heureuse de pouvoir dire que je n’ai jamais vu de pelle. Il est clair que nous n’évoluons pas dans le même monde.

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Fin 2002, Neil MacFarquhar signe dans le New York Times un article consacré au Hezbollah, dans lequel on peut lire, entre autres, ceci :
« Au Liban, le Hezbollah a deux faces : l’une, publique, l’autre, intensément privée… 12 membres au Parlement, une station de télévision et une de radio, une entreprise de construction… des services médicaux et de nombreuses institutions caritatives…
Mais… ‘‘au plus profond, il y a un service de sécurité militaire dont même les membres du Hezbollah ne savent rien’’, dit Waddah Sharara, professeur de sociologie à l’Université et descendant de religieux chiites du sud-Liban…
Les experts estiment que la Syrie et l’Iran coordonnent cette activité, mais l’identité de celui qui assure la liaison n’est pas claire.
Ce pourrait être Imad Mughnieh, un homme pour la capture duquel Washington offre 25 millions de dollars. Les Autorités américaines l’accusent d’avoir planifié la plupart des actions terroristes attribuées au Hezbollah, à commencer par les attentats-suicides qui ont tué des centaines d’Américains à Beyrouth en 1983 et 1984.
On le soupçonne d’être responsable du kidnapping et de la mort de nombreux otages occidentaux et il figure sur la liste des terroristes recherchés pour le détournement d’un avion de la TWA en 1985, au cours duquel un plongeur de la US Navy, Robert Dean Stethem, avait été assassiné.
Washington soutient… qu’[Imad Mughnieh] est au Liban, ce que le Liban nie. Quant au Hezbollah, il prétend ne pas le connaître… »

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En 2005, une universitaire américaine, Judith Palmer Harik, publie un livre, Hezbollah: The Changing Face of Terrorism, dans lequel on peut lire ceci :
« … Depuis la fondation du mouvement, les « officiels » du Hezbollah ont tous nié avec force connaître un ‘‘Imad Mughnieh’’. L’évitement… est clairement exprimé par la réponse… d’un membre haut placé du Hezbollah à une question concernant les liens du parti avec Mughnieh : ‘‘[Il] n’a jamais occupé aucun poste dans l’Organisation, a déclaré le Secrétaire Général adjoint, Naim al-Qassim : il n’est qu’un nom’’. »

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Le 13 février 2008, au lendemain de la mort d’Imad Mughnieh, chef de l’aile militaire du Hezbollah et officier supérieur des Gardes Révolutionnaires iraniens, le Hezbollah publie le communiqué suivant :
« Avec fierté et honneur, nous annonçons le martyre d’un grand résistant qui a rejoint une procession de martyrs de la Résistance Islamique. Après une vie pleine de Jihad, de sacrifices et d’accomplissements vécue dans l’aspiration au martyr, Hajj Imad Mughnieh… dirigeant de la Résistance Islamique a été assassiné par de criminelles mains ‘‘israéliennes’’. Le martyr, que son âme repose en paix, a été la cible des sionistes pendant plus de 20 ans. Allah Tout-Puissant l’a choisi pour être un martyr aux mains des assassins du Prophète qui savent que nous nous battons avec eux depuis longtemps et le sang de nos martyrs, spécialement celui de nos dirigeants, a toujours, en la menant à un niveau supérieur, renforcé notre résistance, tout comme cela s’est produit quand nos deux grands dirigeants, Sheikh Ragheb Harb and Sayyed Abbas Moussawi, ont été martyrisés.
Nous jurons de suivre la voie du martyr jusqu’à la victoire complète, si Dieu veut. Nous offrons nos sincères condoléances à la famille du martyr et à ses frères d’armes, et nous félicitons tous les résistants qui combattent pour la Divine Légion de l’Honneur ».


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Sources:
Oscar Wilde, The Importance of Being Earnest.
Neil MacFarquhar, « Hezbollah Becomes Potent Anti-U.S. Force », New York Times, 24 décembre 2002.

Martin Kramer, « Imad who? », Middle East Strategy at Harvard, 14 février 2008.
Judith Palmer Harik, Hezbollah: The Changing Face of Terrorism, New York : I.B. Tauris, 2005.
Bill Roggio, « Hezbollah terrorist leader Imad Mughnieh killed in Syria », The Long War Journal, 13 février 2008.
Illustrations : copyright Alain Bellaïche.

vendredi 15 février 2008

De mortuis nil nisi bonum dicendum est




Georges Tabard (Michael Lonsdale) : Antoine, parlez-vous anglais ?
Antoine Doinel (Jean-Pierre Léaud) : J’apprends avec des disques, mais ce n’est pas facile.
GT : Les disques, c’est de la blague. Il n’y a qu’une seule façon d’apprendre : au lit, avec une anglaise… J’ai appris avec une australienne pendant que son mari peignait des maisons.
Fabienne Tabard (Delphine Seyrig) : Comme Hitler.
GT : Adolf Hitler n'a jamais été peintre en bâtiment ! C’est de la calomnie. Il peignait des paysages.

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A la fin janvier 2008, on apprenait le décès du Docteur Georges Habache [dit El Hakim, le Sage], emporté par une crise cardiaque à Amman (Jordanie), où il résidait depuis 1992.
Dans Al Watan (quotidien algérien « indépendant »),
Hamid Tahri
fait un portrait réaliste-soviétique de « [cet] adversaire irréductible de l’Etat juif… dont [il] prônait la destruction, [de ce] chef de guérilla marxiste en qui nombre de Palestiniens célébraient un patriote… [de cette] personnalité attachante, populaire, parfois timide, jusqu’à l’effacement, mais aussi intransigeante, sévère, pour ne pas dire dure lorsqu’il s’agit de dénoncer toutes les injustices, toutes les vilénies... » « Il est modeste, chaleureux, amical, délicat, disait de lui un de ses amis, militant de la vieille garde palestinienne. Mais, quand il s’agit de politique, c’est un chef dur et obstiné dans le carcan de ses convictions ».

Extraits :

« Né le 2 août 1926 à Lydda en Palestine (aujourd’hui Lod) dans une famille de commerçants grecs orthodoxes, Georges a suivi un cursus scolaire sans accrocs, jusqu’à cette fatidique année 1948. Alors qu’il suit des études de médecine à l’université américaine de Beyrouth, son destin bascule devant la barbarie à visage inhumain de la Hagannâh, milice sioniste qui s’emploie violemment à nettoyer ethniquement la Palestine. La population arabe de sa ville natale est priée de quitter les lieux dans l’heure, sous peine de mort. Les protestataires sont froidement abattus […].
Habache assiste impuissant à ce triste épisode. Des centaines de femmes et d’enfants sont tués. En six mois d’opérations, ce sont 800 000 Palestiniens qui prennent le chemin de l’exil. Habache retourne à Beyrouth où il fonde, avec un autre étudiant palestinien grec orthodoxe, Waddie Haddad, Les jeunesses de la vengeance, un groupe armé clandestin visant à faire pression sur les dirigeants arabes, en éliminant ceux qui collaborent avec l’occupant sioniste. Avec son doctorat en poche et sa spécialisation en pédiatrie, il part avec son ami soigner les réfugiés dans un camp en Jordanie…
… En 1957, il est impliqué dans la tentative de coup d’Etat contre le jeune roi Hussein de Jordanie. Il est condamné par contumace à 33 ans de prison. Il fuit en Syrie, puis au Liban…
… La guerre des Six jours, une autre malédiction arabe, qui verra l’effondrement du nassérisme, donnera l’occasion à Georges de fédérer de nombreux groupes de résistants [notamment le Front de Libération de la Palestine d'Ahmed Jibril] au sein du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) dont il devient le premier secrétaire général. Le parti connaîtra des problèmes. L’aile marxiste-léniniste fait scission autour de Nayef Hawatmeh qui crée le Front Démocratique de Libération de la Palestine (FDLP). Habache devient, au fil des mois, le leader dont les masses arabes rêvaient. Il devient la bête noire des Israéliens…
… Dans les années qui suivent, Georges montre clairement son hostilité à la politique menée par Arafat. Le FPLP quitte le Parlement national palestinien. Lors de la signature de l’accord d’Oslo en 1993, George constitue un front du refus à Damas et l’élargit aux groupes islamistes tels que le Hamas et le Jihad. Son état de santé l’oblige à quitter progressivement la scène politique… En 1992, [déjà]… Georges a[vait] été victime en 1992 d’une attaque cérébrale. Il avait été accueilli et soigné en urgence en France [à l’hôpital Henri Dunant], ce qui avait provoqué un tollé, notamment au sein de la droite française qui s’en était pris à
Roland Dumas, alors ministre des Affaires étrangères…
… Durant la crise du Golfe [1990-91], il consent à se rendre à Amman pour la première fois depuis le Septembre noir de 1970 et à rencontrer son vieil ennemi, le roi Hussein. Mais il n’a rien perdu de sa véhémence ! Alors, dénonçant la coalition anti-irakienne, il déclare, notamment : ‘‘Nous avons le doigt sur la gâchette pour ouvrir le feu sur les intérêts américains et occidentaux’’.
… [Il démissionne] en 2000 de son poste de secrétaire général… son adjoint Zibri, alias Abou Mustapha… lui succède... [Il] sera assassiné par l’armée israélienne à Ramallah le 27 août 2001. Son successeur Ahmed Saâdat [professeur de mathématiques] est emprisonné [par l’Autorité Palestinienne] depuis 2002 [pour avoir commandité l’assassinat, en 2001, du ministre israélien du Tourisme, Ré’havam Zéevi]...
… Le FPLP a à son actif de hauts faits d’armes. Dans son tableau de chasse, il a commandité l’attentat de l’aéroport de Tel Aviv [situé à Lod] commis en 1972 par trois kamikazes japonais (26 morts)… ordonné l’attaque contre les passagers d’El Al à Orly en 1978 (deux morts), puis l’attentat contre la synagogue de la rue Copernic à Paris en 1980 (deux morts, soixante-deux blessés)… [organisé] détournements [d’avions] et enlèvements [d’israéliens, d’américains, de français, notamment] au nom de la lutte palestinienne…. Sans parler de l’assassinat de nombreux collaborateurs dont le plus connu est Zafer El Masri, maire de Naplouse en 1986…
… Il a vécu pour son peuple, et il est mort pour son peuple. Son épouse Hida a promis de continuer le combat : ‘‘Nous porterons la bannière de Habache et de la nation arabe qu’il chérissait. Habache a toujours cru que la Palestine serait libérée’’… »
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Le président de l'Autorité palestinienne, M. Mahmoud Abbas, a rendu hommage samedi à Georges Habache. Selon son porte-parole, Nabil Abou Roudeina, il a déclaré : « Le décès de ce leader historique est une grande perte pour la cause palestinienne et pour le peuple palestinien pour lequel il a combattu durant soixante ans » et ordonné « de mettre les drapeaux en berne pour trois jours en signe de deuil et d'ouvrir une salle pour recueillir les condoléances »...
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Sources :
François Truffaut, « Baisers volés » (1968).
Hamid Tahri, « Georges Habache, le leader palestinien rebelle, est décédé à 82 ans », Al Watan, 31 janvier 2008.
Le Monde.fr, 26 janvier 2008.
Illustration (Képisme) : Copyright François Bensimon

dimanche 10 février 2008

Miroirs impolis & Alouettes déplumées

Dans ses Mémoires, Louis XIV écrit, à propos du protocole : « Ceux-là s’abusent lourdement qui s’imaginent que ce ne sont là que des affaires de cérémonies. Les peuples sur qui nous régnons, ne pouvant pénétrer le fond des choses, règlent d’ordinaire leurs jugements sur ce qu’ils voient au dehors, et c’est le plus souvent sur les préséances et les rangs qu’ils mesurent leur respect et leur obéissance. Comme il est important au public de n’être gouverné que par un seul, il lui est important aussi que celui qui fait cette fonction soit élevé de telle sorte au-dessus des autres qu’il n’y ait personne qu’il puisse ni confondre ni comparer avec lui, et l’on ne peut, sans faire tort à tous les corps de l’Etat, ôter à son chef les moindres marques de la supériorité qui le distingue des membres ».
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« Le président français Nicolas Sarkozy a déposé jeudi 7 février une plainte à l'encontre du site internet nouvelobs.com, entité distincte de l’hebdomadaire Le Nouvel Observateur, qui a fait état d'un SMS adressé… à son ex-épouse, huit jours avant son mariage avec Mme Carla Bruni, déclarant: ‘‘Si tu reviens, j'annule tout’’.
Cette plainte vise les faits de ‘‘faux, usage de faux et recel, après la parution, le 6 février 2008 à 12h40, d'un article sous le titre : ‘L'obsession de Cécilia’ ’’, déclare son avocat, Me Thierry Herzog, dans un communiqué. La qualification de faux se justifie dans le code pénal par toute altération de la vérité, a [–t-il] expliqué ».
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« Les USA ont invité Israël à trouver d’autres moyens [qu’un blocus] pour punir le Hamas afin d’éviter une crise humanitaire à Gaza, a déclaré le Secrétaire d’Etat [américain], Mme Condoleezza Rice, le 22 janvier 2008.
Mme Rice s’est entretenue avec les journalistes dans l’avion qui l’emmenait à Berlin où elle doit rencontrer ses homologues britannique, français, allemand, russe et chinois, pour discuter d’un nouveau train de sanctions contre l’Iran en raison de son programme nucléaire.
‘‘Nous avons dit aux israéliens combien il était important de ne pas laisser une crise humanitaire se développer là-bas… Ils disent ne pas vouloir d’une crise humanitaire et comprendre la nécessité de fournir Gaza en fuel et en électricité, alors on verra’’. [Les israéliens ont autorisé ce mardi matin l’entrée de fuel et de médicaments à Gaza…]
Mme Rice répondait à une question à propos de l’appel du ministre égyptien des Affaires étrangères, M. Ahmed Abul Gheit, qui lui avait demandé de faire pression sur Israël pour {trouver une solution} à la situation humanitaire en voie de détérioration à Gaza ».
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« [Le 24 janvier 2008] Des combattants palestiniens déclenchent au moins 15 explosions au pied du mur séparant Gaza de l’Egypte...
Les palestiniens se sont répandus en masse du côté égyptien du passage de Rafah, au travers des trous faits par les explosions dans le mur-frontière séparant l’Egypte de la bande de Gaza.
Ces scènes se sont produites au 6e jour du blocus de Gaza, imposé par Israël avec le soutien de l’Egypte, en réponse à l’intensification des tirs de roquettes sur les villes-frontières israéliennes…
Amr El-Kahky, couvrant l’événement pour Al Jazeera du côté égyptien du passage de Rafah, rapporte que les forces de sécurité égyptiennes n’ont pas réagi à l’entrée des palestiniens.
Le président égyptien, M. Hosni Mubarak, a déclaré plus tard qu’il avait ordonné à ses soldats de laisser les palestiniens entrer en Egypte parce qu’ils étaient affamés : ‘‘Je leur ai dit de les laisser entrer pour qu’ils puissent manger et acheter de la nourriture, et de les laisser repartir [librement] après, pour autant qu’ils ne rapportent pas d’armes’’. »
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Le 7 février 2008, Noha El-Hennawy, bloguant pour le site du Los Angeles Times, écrit du Caire : « … 10 jours après [l’entrée en masse des palestiniens en Egypte], les sentiments ont visiblement changé. Rosa-al-Yousef, journal gouvernemental ayant la réputation d’être le plus démonstratif des porte-parole du régime… a fait l’une de ses ‘unes’ récentes, à la suite d’incidents à la frontière égypto-palestinienne, avec le gros titre suivant : ‘‘L’Egypte est généreuse et patiente mais sa patience a des limites’’…
‘‘Il n’est pas vrai que le siège imposé à Gaza ait causé une crise humanitaire sérieuse ayant conduit les palestiniens à inonder [l’Egypte]’’, écrit Abdullah Kamal, rédacteur en chef de Rosa-al-Yousef et ferme partisan du régime de M. Mubarak. ‘‘Chaque [Gazaoui] a dépensé en moyenne 260 $ [160 €, environ] en 3 jours… Le montant total des dépenses pendant cette période [où les Gazaouis ont forcé leur passage en Egypte] a atteint 220 millions de dollars [140 000 000 €, environ]. Ces chiffres soulèvent de vraies questions à propos de la situation financière dans la Bande de Gaza’’. »

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Illustrations : copyright Patrick Jelin.

Sources :

Guillaume Monsaingeon, Avant-propos, « Saint-Simon, Une fin de règne », Autrement Littératures, Paris, 1995.
« Sarkozy porte plainte contre Le Nouvel Observateur », DHnet, 7 février 2008.
« Rice calls on Israel to avoid crisis », CNN.com, 22 janvier 2008.
« Blockaded Gazans pour into Egypt », Al Jazeera, 24 janvier 2008.
Noha El-Hennawy, « Change of Heart », Los Angeles Times, 7 février 2008.








lundi 4 février 2008

Qui veut noyer ses chiens…

Copyright Alain Bellaïche

En 1966, le Nouvel Observateur publie un article de Catherine Vimenet sur la prostitution dans les Grands Ensembles : des mères de famille s’y livreraient occasionnellement pour boucler leurs fins de mois. La presse ne lui fera pas écho.
Jean-Luc Godard fond l’article dans une nouvelle de Maupassant, Le Signe, et, l’année suivante, sort « 2 ou 3 choses que je sais d’elle ». Elle : la banlieue parisienne, une femme, une actrice (Marina Vlady) ; la marchandise, la consommation, l’exploitation, la parcellisation, la déshumanisation ; la narration, l’image cinématographique, la bande-son, etc. Un film furieusement intelligent, virtuose, compliqué, dense, conscient et préoccupé de soi. La musique est de Beethoven, la photographie, de Raoul Coutard, la mise en abyme, son opérateur – la voix off, celle de Godard. Un faux documentaire prévenant l’identification, trouant la représentation, exhibant sa nature. Une fiction. On aime, on n’aime pas, on est séduit ou pas, on sait avec quoi on a affaire.
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Le 13 janvier 2008, Le New York Times publie, en première page, un article, le premier d’une assez longue série, intitulé « Across America, Deadly Echoes of Foreign Battles », fruit de plusieurs mois d’étude et d’analyse de données.
Extraits :

« D’une ville à l’autre à travers le pays, les gros titres racontent des histoires semblables. Lakewood (Washington) : « Leur fils tue sa femme. La famille accuse l’Irak ». Pierre, (Sud Dakota) : Un soldat accusé de meurtre parle de stress d’après-guerre ». Colorado Springs : « Des vétérans d’Irak soupçonnés d’un double assassinat… »
Individuellement, ce sont des récits de crimes locaux, suite poignante à la guerre pour les militaires, leurs victimes et leurs communautés. Pris ensembles, ils composent l’image contrastée d’un phénomène rampant, traçant une piste de mort et de cœurs brisés à travers le pays.
Le New York Times a recensé 121 cas de vétérans revenus d’Irak ou d’Afghanistan ayant commis des assassinats ou été inculpés de meurtre… »

Oouch.
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Le jour même, Power Line Blog s’inquiète de la teneur en information de l’article du NYT : « Comment le taux de criminalité chez les vétérans d’Irak et d’Afghanistan se compare-t-il avec celui des jeunes américains en général ? …
En 2005, le taux de criminalité chez les 18-24, tranche d’âge à laquelle appartiennent la plupart des soldats, était autour de 27 pour 100 000…. Si l’on suppose, estimation basse, que 700 000 soldats [toutes armes confondues] ont servi dans les 2 zones de combat, les 121 cas identifiés par le NYT… représentent 17 pour 100 000… Encore faut-il remarquer ceci : 27 pour 100 000 est un taux annuel, alors que les 121 supposés crimes (certains relèvent de comportements dangereux au volant) ont été commis pendant une période de 6 ans… »
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Le 27 janvier 2008, Clark Hoyt, médiateur du NYT, admet que « le Times a fait quelques faux-pas… Le premier [article sur la criminalité chez les vétérans] utilisait un langage excessif… pour [décrire] une tendance qu’il ne pouvait pas valablement quantifier… l’essai d’analyse statistique [était] basé sur des chiffres incertains…
… Les journalistes qui ont le plus contribué à la série – les reporters Lizette Alvarez et Deborah Sontag, et leur chef de rubrique, Matthew Purdy – ont expliqué pourquoi l’idée d’une comparaison avec le taux de criminalité chez les civils ne leur semblait pas appropriée. Les militaires n’acceptent pas des personnes ayant des problèmes psychiques ou un casier judiciaire chargé – les civils les plus susceptibles d’être des meurtriers – aussi le taux [de criminalité chez les militaires] est susceptible d’être plus bas et la comparaison non pertinente…

Au bout du compte, certains des 121 cas recensés par le NYT peuvent être clairement reliés au stress d’après-guerre, d’autres semblent plus contestables… »
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Sources :

Mark Steyn, « UnphenomenalTimes. Fake but ... fake », National Review On Line, 19 janvier 2008.
Matthiew Purdy, « Across America, Deadly Echoes of Foreign Battles », NYT, 13 janvier 2008.

John Hinderaker, « Crazed Veterans Spark Natiowide Crime Wave », Power Line, 13 janvier 2008.
John Hinderaker, « The Grudging Ombudsman », Power Line, 27 janvier 2008.