dimanche 24 août 2008

Quand un défenseur de l’ours slave montre les crocs…

Le 20 août 2008, le New York Times publie, sous le titre « Russia Never Wanted a War », un éditorial (rédigé à Moscou) de M. Mikhail Gorbachev, secrétaire-général du Parti Communiste et président de l’URSS de 1985 à 1991 (!), devenu récemment, avec l’actrice Catherine Deneuve et les joueurs de tennis André Agassi et Steffi Graf, figure iconique de la communication du bagagiste Louis Vuitton (Louis Vuitton), celui-ci ayant accepté de faire une donation à Green Cross International (greencrossinternational.net), l’association environnementale créée par l’ancien dirigeant soviétique.

– Il est à noter que chacun des « visuels » de la campagne « Vuitton », signée Annie Leibovitz, porte mention du soutien de la marque au Climate Project de l’ancien vice-président américain, M. Albert Arnold Gore Jr.

Extraits :

« La phase aiguë de la crise provoquée par l’assaut des forces géorgiennes contre Tskhinvali, capitale de l’Ossétie du Sud, est maintenant derrière nous. Mais comment effacer de sa mémoire… l’attaque de nuit à la roquette, les quartiers entièrement rasés, les vieux monuments détruits… avec les tombes ancestrales ?

La Russie ne voulait pas de cette crise*. Le pouvoir russe est dans une position forte à l’intérieur ; il n’avait pas besoin de gagner une petite guerre. La Russie a été entraînée par l’imprudence du président géorgien, Mikheil Saakashvili – qui n’aurait jamais osé attaquer sans soutien extérieur (!). Son attaque lancée, la Russie ne pouvait se permettre l’inaction…

En décidant d’arrêter maintenant les hostilités, le président russe (!), Dmitri Medvedev (!!)… s’est comporté en dirigeant responsable. Le président russe (!!!) a réagi avec calme, maîtrise et fermeté. Quiconque attendait de la confusion à Moscou aura été désappointé.

Les planificateurs de cette campagne voulaient être sûrs que, quelle qu’en fût l’issue, la Russie serait accusée d’aggraver la situation. Et l’Occident a alors monté une campagne de propagande contre la Russie, avec les médias américains en tête…

Il n’est pas encore certain que l’Occident ait été averti du plan d’invasion de l’Ossétie du Sud de M. Saakashvili… Une chose est sure : l’entraînement des troupes géorgiennes et la livraison de grandes quantités d’armes par l’Occident ont plus poussé la région vers la guerre que vers la paix.

Si cette mésaventure militaire a surpris les protecteurs étrangers du dirigeant géorgien, tant pis…

M. Saakashvili a été loué parce qu’il était un fidèle allié de l’Amérique et un vrai démocrate – et qu’il aidait en Irak. Maintenant, l’ami de l’Amérique a provoqué le désordre, et nous tous – les Européens (!) et, plus important, les civils innocents (!!) de la région – devons ramasser les morceaux.

Ceux qui portent des jugements hâtifs sur ce qui se passe dans le Caucase, ou bien ceux qui veulent y exercer une influence devraient d’abord avoir idée des complexités de la région. Les Ossètes vivent à la fois en Géorgie et en Russie. La région est une mosaïque de groupes ethniques vivant en étroite proximité. Ainsi, dire « c’est notre terre » ou « nous libérons notre terre » n’a pas de sens. Nous devons d’abord penser aux gens qui vivent sur cette terre.

Les problèmes du Caucase ne peuvent pas être résolus par la force (!)…

Ce qu’il faut, c’est un accord, ayant force de loi (!!), [stipulant qu’on ne doit] pas utiliser la force. M. Saakashvili a plusieurs fois refusé de signer un tel accord, pour des raisons qui sont maintenant extrêmement claires.

L’Occident serait avisé de contribuer à la signature d’un tel accord… Si, au contraire, il décide de blâmer la Russie et de réarmer la Géorgie… une nouvelle crise est inévitable. Dans ce cas, le pire est à attendre (!).

La secrétaire d’Etat, Condoleeza Rice, et le président Bush ont récemment promis qu’ils allaient isoler la Russie. Certains hommes politiques américains ont menacé de l’expulser du Groupe des 8 [nations les plus industrialisées], d’annuler le Conseil OTAN-Russie et de maintenir la Russie hors de l’Organisation Mondiale du Commerce.

Ce sont des menaces creuses (!). Depuis quelque temps, les Russes se disent : si notre opinion ne compte pas pour ces institutions, est-ce que nous avons vraiment besoin d’elles ?…

De fait, ça fait longtemps qu’on dit à la Russie d’accepter les faits [accomplis]. L’indépendance du Kosovo… l’abrogation du Traité anti-missiles balistiques, le projet américain d’installation de missiles dans les pays proches… l’expansion sans fin de l’OT AN. Et tout ça accompagné de propos aimables à propos de partenariat. Qui donc accepterait cette mascarade ?


Il est souvent question ces jours-ci aux Etats-Unis de revoir les relations avec la Russie. Une chose devrait d’évidence être revue : l’habitude de parler à la Russie de façon condescendante, sans égard pour ses positions et ses intérêts… »

* Voir, dans le 11ème blog, Gaïdz Minassian, Drôle de guerre en Ossétie du Sud… (9 août 2008), et Antoine Lefébure, La Géorgie ne répond plus (12 août 2008).

***

Sources :

Mikhail Gorbachev, « Russia Never Wanted a War » (translated by Pavel Palazhchenko from the Russian), New York Times, 20 août 2008.

James Taranto, « BagMan », Wall Street Journal, 21 août 2008.

« catherine Deneuve & Gorbachev posent pour Louis Vuitton », studiohybride.canalblog.com, 16 août 2007.

Illustrations :

Vuitton-Jeux-de-Rôles, copyright Dominique Fury.

YSL (obsèques de), copyright Patrick Jelin.

Bank of America (Baltimore MD), copyright RZ.

Aucun commentaire: